Birmanie - Tavoy, un méga projet industriel et logistique qui menace population et environnement
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Birmanie - Tavoy, un méga projet industriel et logistique qui menace population et environnement
Un port en eau profonde, 260 km² d’usines de tous types, une voie ferrée et une route vers la Thaïlande : voilà ce que des industriels thaïs ont commencé à construire dans le sud birman. Les milliards de dollars budgétés ont juste oublié un ‘petit’ détail : l’indemnisation des villageois du site et la protection de la biodiversité.
Un projet controversé
C’est environ 30 000 habitants de 19 villages qui sont concernés. Alors que les travaux de ce projet de 8,6 milliards de dollars ont commencé, ils n’ont toujours reçu aucune information sur ce qu’on leur prépare. Ce qui les inquiète le plus, c’est de savoir où ils seront relogés. Mais ils ne s’attendent pas à avoir le choix. Un habitant de Nabule, petit village situé sur la zone, donne le ton :
S’ils nous ordonnent de partir, on ne pourra pas résister.
Le projet a été imaginé dès 2008 et confirmé en octobre de l’année dernière, lors d’une visite du premier ministre thaï Abhisit Vejjajiva. Bien que les travaux aient déjà commencé, certains se disent sceptiques sur la possibilité de le mener à bien. A cause de l’implication du régime militaire birman, la banque de développement asiatique, ainsi que plusieurs banques privées, ont décliné. Mais le promoteur Italian-Thai Development Public Company, basé à Bangkok, déclare avoir les financements nécessaires.
Si le projet est viable financièrement, qu’en est-il des aspects économiques, environnementaux et sociaux ? Sean Turnell est un expert de l’économie birmane à l’université Macquarie de Sydney. Il est pessimiste :
A long terme, ce projet pourrait s’avérer bénéfique pour l’économie locale si un gouvernement véritablement intéressé par le bien-être de son peuple venait à arriver dans le pays (…) Mais au Myanmar, les bénéfices iront dans les poches des généraux et l’économie locale en profitera à peine.
Négligés les habitants et la nature
Mais avant de se soucier de l’impact sur l’économie locale, qu’en est-il des habitants actuels de la zone ? A Tavoy, une ville de 150 000 habitants, les prix du foncier ont triplé ces derniers mois. Des terrains auparavant cultivés par des villageois ont simplement été confisqués par l’administration et vendus à des hommes d’affaires qui se précipitent pour construire hôtels, banques et immeubles.
Du côté de l’impact sur la nature, le tableau n’est pas rose non plus. Les activistes locaux de la cause s’inquiètent du fait que ni promoteurs ni gouvernement ne se soient souciés de conduire une étude sur l’impact environnemental de l’entreprise.
La construction d’un port en eau profonde va fortement affecter la biodiversité maritime de la région
…, déclare un biologiste birman.
La mangrove et les barrières de corail sont nécessaires à la reproduction de nombreuses espèces. A cause de leur destruction occasionnée par la construction du port, ces espèces vont disparaître, la biodiversité locale va être ruinée.
Le plus regrettable selon lui est la disparition de 600 espèces de coraux qui ont été identifiées sur l’archipel de Mergui, constitué de 800 petites îles.
Après la dévastation occasionnée par la construction du complexe viendront les polluants relâchés par les bateaux et les usines pétrochimiques, qui occasionneront nécessairement un problème dur à résoudre.
Le plus ironique dans l’histoire, c’est que c’est précisément ce manque de considération pour les villageois et l’environnement qui fait le succès du projet auprès des investisseurs thaïs. Les dénonciateurs du projet soulignent que c’est dans un contexte où la protection de l’environnement devient un facteur important dans l’attribution des grands chantiers thaïs que les financiers se tournent vers le voisin birman. Le coût associé à la protection de l’environnement est selon eux trop élevé dans leur pays…
Mais ces investisseurs devraient se méfier. Car selon Matthew Smith, de l’ONG Earth Rights International (ERI),
ils prennent un risque majeur quant à leur réputation. Et malgré la propagande du régime birman, les investisseurs étrangers oublient qu’ils pourraient se retrouver devant les tribunaux internationaux, accusés de complicité dans les abus perpétrés par le pouvoir de la junte militaire birmane.
www.irrawaddy.org
http://www.greenetvert.fr/2011/01/22/tavoy-un-mega-projet-industriel-et-logistique-qui-menace-populations-et-environnement/12293
Un projet controversé
C’est environ 30 000 habitants de 19 villages qui sont concernés. Alors que les travaux de ce projet de 8,6 milliards de dollars ont commencé, ils n’ont toujours reçu aucune information sur ce qu’on leur prépare. Ce qui les inquiète le plus, c’est de savoir où ils seront relogés. Mais ils ne s’attendent pas à avoir le choix. Un habitant de Nabule, petit village situé sur la zone, donne le ton :
S’ils nous ordonnent de partir, on ne pourra pas résister.
Le projet a été imaginé dès 2008 et confirmé en octobre de l’année dernière, lors d’une visite du premier ministre thaï Abhisit Vejjajiva. Bien que les travaux aient déjà commencé, certains se disent sceptiques sur la possibilité de le mener à bien. A cause de l’implication du régime militaire birman, la banque de développement asiatique, ainsi que plusieurs banques privées, ont décliné. Mais le promoteur Italian-Thai Development Public Company, basé à Bangkok, déclare avoir les financements nécessaires.
Si le projet est viable financièrement, qu’en est-il des aspects économiques, environnementaux et sociaux ? Sean Turnell est un expert de l’économie birmane à l’université Macquarie de Sydney. Il est pessimiste :
A long terme, ce projet pourrait s’avérer bénéfique pour l’économie locale si un gouvernement véritablement intéressé par le bien-être de son peuple venait à arriver dans le pays (…) Mais au Myanmar, les bénéfices iront dans les poches des généraux et l’économie locale en profitera à peine.
Négligés les habitants et la nature
Mais avant de se soucier de l’impact sur l’économie locale, qu’en est-il des habitants actuels de la zone ? A Tavoy, une ville de 150 000 habitants, les prix du foncier ont triplé ces derniers mois. Des terrains auparavant cultivés par des villageois ont simplement été confisqués par l’administration et vendus à des hommes d’affaires qui se précipitent pour construire hôtels, banques et immeubles.
Du côté de l’impact sur la nature, le tableau n’est pas rose non plus. Les activistes locaux de la cause s’inquiètent du fait que ni promoteurs ni gouvernement ne se soient souciés de conduire une étude sur l’impact environnemental de l’entreprise.
La construction d’un port en eau profonde va fortement affecter la biodiversité maritime de la région
…, déclare un biologiste birman.
La mangrove et les barrières de corail sont nécessaires à la reproduction de nombreuses espèces. A cause de leur destruction occasionnée par la construction du port, ces espèces vont disparaître, la biodiversité locale va être ruinée.
Le plus regrettable selon lui est la disparition de 600 espèces de coraux qui ont été identifiées sur l’archipel de Mergui, constitué de 800 petites îles.
Après la dévastation occasionnée par la construction du complexe viendront les polluants relâchés par les bateaux et les usines pétrochimiques, qui occasionneront nécessairement un problème dur à résoudre.
Le plus ironique dans l’histoire, c’est que c’est précisément ce manque de considération pour les villageois et l’environnement qui fait le succès du projet auprès des investisseurs thaïs. Les dénonciateurs du projet soulignent que c’est dans un contexte où la protection de l’environnement devient un facteur important dans l’attribution des grands chantiers thaïs que les financiers se tournent vers le voisin birman. Le coût associé à la protection de l’environnement est selon eux trop élevé dans leur pays…
Mais ces investisseurs devraient se méfier. Car selon Matthew Smith, de l’ONG Earth Rights International (ERI),
ils prennent un risque majeur quant à leur réputation. Et malgré la propagande du régime birman, les investisseurs étrangers oublient qu’ils pourraient se retrouver devant les tribunaux internationaux, accusés de complicité dans les abus perpétrés par le pouvoir de la junte militaire birmane.
www.irrawaddy.org
http://www.greenetvert.fr/2011/01/22/tavoy-un-mega-projet-industriel-et-logistique-qui-menace-populations-et-environnement/12293
thanaka- Admin
- Localisation : il existe une application pour ça
Messages : 2606
Date d'inscription : 31/05/2009
la résistance s'organise contre un immense projet industriel
MAYINGYI (Birmanie) - La colère monte peu à peu, dans le sud de la Birmanie, contre un projet industriel tentaculaire qui forcera des milliers de villageois à quitter leurs terres, une lutte qui symbolise un peuple longtemps muselé mais qui ose de plus en plus se faire entendre.
Dans l'esprit du gouvernement et des promoteurs, le port en eaux profondes de Dawei est une clé du développement de l'Asie du Sud-Est, un complexe relié à Bangkok, qui ouvre le chemin vers l'Europe en évitant Singapour et le détroit de Malacca.
A terme, le projet de 250 kilomètres carrés comprendra notamment une aciérie, une usine de pétrochimie et une raffinerie. De l'industrie lourde et sale, que ne font pas oublier les maisons promises aux villageois, avec écoles, hôpitaux, eau courante et électricité.
On ne veut pas partir, proteste San Nyein, paysan de 53 ans du village de Mayingyi. Notre région a des noix de coco, des noix de bétel, des cajous et des tamarins. Nous avons tout ce qu'il nous faut.
La mer nous nourrit depuis notre enfance. Où irons-nous pêcher si nous devons aller dans une ville nouvelle ?, renchérit Tin Hlaing, 56 ans, pêcheur d'un hameau voisin.
Depuis quelques mois, les promoteurs immobiliers ont fait exploser le prix de la terre.
Quand nous nous sommes plaints, ils ont répondu que nous n'avions pas de documents de propriété. Ils disent que le vrai propriétaire, c'est l'Etat, donc nous n'osons pas nous battre contre eux, a avoué à l'AFP un villageois, sous couvert de l'anonymat.
Au total, quelque 20.000 personnes sont censées être relogées, selon la presse gouvernementale. Mais avec la dissolution de la junte au pouvoir en mars 2011, après un demi-siècle d'un pouvoir militaire qui s'arrogeait le droit de disposer des terres à sa guise, la contestation n'est plus complètement taboue.
En septembre 2011, à la surprise générale, le gouvernement a suspendu un projet de barrage de 3,6 milliards de dollars construit par les Chinois en Etat Kachin (extrême-nord).
Le président Thein Sein, qui a multiplié les réformes depuis sa prise de fonction, a de facto donné raison aux revendications des populations locales et des environnementalistes, au détriment de Pékin, allié de toujours. Un geste impensable auparavant.
Plus récemment, c'est une centrale au charbon qui a été rayée du projet de Dawei.
Les villageois de Dawei sont donc prêts à se battre. D'autant que le complexe avance bien moins vite que prévu, et que les bulldozers tant redoutés ne sont pas encore sur place.
Dans un pays éreinté par cinquante ans de gestion militaire, les experts soulignent que l'économie birmane toute entière doit être remodelée, avec des systèmes légal et bancaire et des infrastructures physiques à rebâtir.
Et même si son potentiel suscite des convoitises, il est encore trop tôt pour imaginer un boom économique.
La compagnie Ital-Thai, en charge du projet, a de gros problèmes pour lever des fonds, et ce n'est pas surprenant car les chiffres sont vraiment énormes, relève Sean Turnell, économiste à l'université Macquarie de Sydney.
Il y a eu un vrai revirement du sentiment des investisseurs dans ce projet, et je pense que c'est surtout ça qui le ralentit.
Le groupe thaïlandais assure que les investissements - 4,5 milliards de dollars pour la première phase, 8,5 milliards pour la deuxième - iront jusqu'au bout. Il évoque un complexe final d'une valeur de 50 milliards de dollars.
Notre projet a reçu l'approbation du gouvernement. Ils nous ont même demandé de l'accélérer et nous soutiennent sur le plan légal. Il n'y a pas lieu de s'inquiéter, assure Somchet Thinaphong, patron de la Dawei Development Company, filiale d'Ital-Thai.
Mais les villageois regardent la bande de terre immaculée qui les a vus naître, et ne peuvent se résoudre à la voir disparaître. A l'image de Than Myint, paysan de 64 ans. Je veux rester ici (...). Nous ne comprenons pas la ville. Elles sont toutes pareilles.
AFP
Dans l'esprit du gouvernement et des promoteurs, le port en eaux profondes de Dawei est une clé du développement de l'Asie du Sud-Est, un complexe relié à Bangkok, qui ouvre le chemin vers l'Europe en évitant Singapour et le détroit de Malacca.
A terme, le projet de 250 kilomètres carrés comprendra notamment une aciérie, une usine de pétrochimie et une raffinerie. De l'industrie lourde et sale, que ne font pas oublier les maisons promises aux villageois, avec écoles, hôpitaux, eau courante et électricité.
On ne veut pas partir, proteste San Nyein, paysan de 53 ans du village de Mayingyi. Notre région a des noix de coco, des noix de bétel, des cajous et des tamarins. Nous avons tout ce qu'il nous faut.
La mer nous nourrit depuis notre enfance. Où irons-nous pêcher si nous devons aller dans une ville nouvelle ?, renchérit Tin Hlaing, 56 ans, pêcheur d'un hameau voisin.
Depuis quelques mois, les promoteurs immobiliers ont fait exploser le prix de la terre.
Quand nous nous sommes plaints, ils ont répondu que nous n'avions pas de documents de propriété. Ils disent que le vrai propriétaire, c'est l'Etat, donc nous n'osons pas nous battre contre eux, a avoué à l'AFP un villageois, sous couvert de l'anonymat.
Au total, quelque 20.000 personnes sont censées être relogées, selon la presse gouvernementale. Mais avec la dissolution de la junte au pouvoir en mars 2011, après un demi-siècle d'un pouvoir militaire qui s'arrogeait le droit de disposer des terres à sa guise, la contestation n'est plus complètement taboue.
En septembre 2011, à la surprise générale, le gouvernement a suspendu un projet de barrage de 3,6 milliards de dollars construit par les Chinois en Etat Kachin (extrême-nord).
Le président Thein Sein, qui a multiplié les réformes depuis sa prise de fonction, a de facto donné raison aux revendications des populations locales et des environnementalistes, au détriment de Pékin, allié de toujours. Un geste impensable auparavant.
Plus récemment, c'est une centrale au charbon qui a été rayée du projet de Dawei.
Les villageois de Dawei sont donc prêts à se battre. D'autant que le complexe avance bien moins vite que prévu, et que les bulldozers tant redoutés ne sont pas encore sur place.
Dans un pays éreinté par cinquante ans de gestion militaire, les experts soulignent que l'économie birmane toute entière doit être remodelée, avec des systèmes légal et bancaire et des infrastructures physiques à rebâtir.
Et même si son potentiel suscite des convoitises, il est encore trop tôt pour imaginer un boom économique.
La compagnie Ital-Thai, en charge du projet, a de gros problèmes pour lever des fonds, et ce n'est pas surprenant car les chiffres sont vraiment énormes, relève Sean Turnell, économiste à l'université Macquarie de Sydney.
Il y a eu un vrai revirement du sentiment des investisseurs dans ce projet, et je pense que c'est surtout ça qui le ralentit.
Le groupe thaïlandais assure que les investissements - 4,5 milliards de dollars pour la première phase, 8,5 milliards pour la deuxième - iront jusqu'au bout. Il évoque un complexe final d'une valeur de 50 milliards de dollars.
Notre projet a reçu l'approbation du gouvernement. Ils nous ont même demandé de l'accélérer et nous soutiennent sur le plan légal. Il n'y a pas lieu de s'inquiéter, assure Somchet Thinaphong, patron de la Dawei Development Company, filiale d'Ital-Thai.
Mais les villageois regardent la bande de terre immaculée qui les a vus naître, et ne peuvent se résoudre à la voir disparaître. A l'image de Than Myint, paysan de 64 ans. Je veux rester ici (...). Nous ne comprenons pas la ville. Elles sont toutes pareilles.
AFP
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Date d'inscription : 31/05/2009
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