l'esprit voyageur en asie du sud-est
Vous souhaitez réagir à ce message ? Créez un compte en quelques clics ou connectez-vous pour continuer.
Le Deal du moment :
Jeux, jouets et Lego : le deuxième à ...
Voir le deal

Indonésie - La forêt enchantée de l’île de Flores

Aller en bas

Indonésie - La forêt enchantée de l’île de Flores Empty Indonésie - La forêt enchantée de l’île de Flores

Message  Admin Jeu 30 Juin 2011 - 6:17

Les habitants de l’île vénèrent depuis la nuit des temps la belle forêt primaire qui jouxte leurs terres. Quantité de légendes et de rites contribuent à nourrir le respect des hommes pour cet environnement sacré. Mais un projet du gouvernement pourrait bien rompre le charme, explique Kompas.


Indonésie - La forêt enchantée de l’île de Flores 2906-FLORES-655

On l’appelle Pong Dode. C’est une forêt luxuriante de quatre hectares qui forme un cercle autour du village de Mano, sur l’île de Flores [province des petites îles de la Sonde orientales]. Personne ne sait depuis combien de temps elle existe, mais une chose est certaine : elle n’a jamais été mutilée pas les hommes, bien qu’elle se trouve aux abords d’un habitat moderne. Quel est donc son secret ?

Depuis des générations, la population locale croit à une loi non écrite qui frappe de malédiction quiconque maltraite cette forêt. “Il est interdit d’abattre les arbres, de s’emparer du bois vert, de couper les branches et même de cueillir les feuilles. Il est également interdit de tuer ou de faire souffrir les chauves-souris, les oiseaux, les singes et autres animaux qui y vivent. Ceux qui enfreignent ces interdits sont frappés d’une fièvre délirante que seul le chaman du village peut guérir”, raconte Yakobus Calon, un habitant de Mano.

Le toponyme Pong Dode répond à plusieurs interprétations. En langue manggarai, pong signifie “forêt” et dode est un dérivé de kode désignant le “singe”. Pong Dode serait donc “la forêt des singes”. Mais, selon l’anthropologue Adi M Nggoro, les ancêtres des Manggarais étaient animistes et considéraient que de cette région émanait une force sacrée appelée pong. Aussi Pong Dode signifierait “le bois des singes sacrés”.

Et, encore de nos jours, les villageois savent lire les augures dans les cris des singes. Si ces derniers s’agitent bruyamment à la tombée de la nuit, une personne du village mourra le lendemain. Les gens de Mano racontent aussi qu’un singe blanc, mystérieux, vit dans la forêt de Pong Dode. Selon la croyance locale, quiconque rencontre ou voit ce singe blanc de ses propres yeux connaîtra des changements fulgurants dans sa vie ou sera comblé par la chance.

Les cent cinquante familles de l’ethnie Kuleng qui vivent autour de cette forêt cultivent du riz, des girofliers et du café dans des champs hors du cercle sacré de Pong Dode. “Je ne fais que perpétuer la loi ancestrale”, explique Kanisius Dunte, le chef du droit coutumier. “Autrefois, les sanctions étaient très sévères. Celui qui abattait un arbre devait offrir un cochon à la communauté s’il voulait être libéré de sa malédiction. Aujourd’hui, l’amende du cochon n’existe plus, mais les villageois continuent à respecter la loi.”

La forêt de Pong Dode abrite autre chose d’unique, à savoir cinq tabernacles faits d’un entassement de terre et de pierres. D’après Kanisius Dunte, ces tabernacles étaient autrefois utilisés pour régler les querelles entre villageois si le tribunal du droit coutumier n’y était pas parvenu. Aujourd’hui, ils n’ont plus de fonction. Cette forêt enchantée possède également deux types de sources qui jamais ne tarissent : les sources masculines et les sources féminines. Près des sources féminines se dresse Wae Dode, un obélisque où les ancêtres sont vénérés lors des cérémonies coutumières. Les femmes n’ont pas le droit de se baigner dans les sources dites masculines, et inversement pour les hommes. “Autrefois, toute transgression était sanctionnée par une amende en nature, rappelle Kanisius Dunte. C’était pour veiller aux bonnes mœurs. Car jadis les vêtements étaient chose rare, en moyenne les gens ne possédaient qu’un seul pagne, celui qu’ils portaient sur eux, si bien que, quand ils se baignaient, ils l’ôtaient pour ne pas le mouiller. Aujourd’hui, les mœurs se sont relâchées, hommes et femmes peuvent partager la même source, mais en gardant sur eux leurs vêtements, car ils en ont de rechange.”

Depuis la conversion des villageois au catholicisme, ces sources limpides ont attiré des pèlerins autour de la grotte de Marie. Et voilà qu’à présent le gouvernement local veut implanter dans cette forêt un jardin zoologique, dans le style des parcs safaris de Java-Ouest, Java-Est et Bali. “Le zoo ne détruira pas la forêt et ne s’étendra que sur un hectare”, précise le chef du bureau régional du tourisme et de la culture. “Les cages contourneront les arbres sans en abattre aucun.” Mais le chef du droit coutumier craint que ce zoo ne modifie l’écosystème de la forêt enchantée, en particulier les sources. Les autorités locales auraient-elles donc oublié les commandements de leurs propres ancêtres ?


Repère déforestation

Selon un rapport de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), en 2010, 52,1 % du territoire indonésien était encore recouvert de forêts, dont 3,8 % de forêts primaires, les plus riches en biodiversité. Entre 1990 et 2010, l’Indonésie a perdu en moyenne 1,02 % de son couvert forestier par an. Une étude publiée en janvier 2011 par des chercheurs de plusieurs universités occidentales montre que l’augmentation des circonscriptions politiques depuis la démocratisation en 1998 et la loi sur l’autonomie régionale, ainsi que le cycle des élections en Indonésie

contribuent largement à l’accélération de la déforestation dans l’archipel. Dans les circonscriptions riches en forêts, les candidats recherchent le soutien de grandes sociétés forestières en contrepartie de l’obtention future de concessions d’exploitation. Dans certaines régions, les coupes illégales augmentent ainsi de plus de 40 % une année avant les élections. L’Observatoire indonésien de la corruption (ICW) dénonce l’impunité des criminels de la déforestation : 71,43 % d’entre eux sont acquittés au terme de leur procès, et 14,29 % sont condamnés à moins d’un an de prison. L’ICW réclame que les lois sur la corruption soient appliquées au crime de déforestation.

http://www.courrierinternational.com/article/2011/06/29/la-foret-enchantee-de-l-ile-de-flores
Admin
Admin
Admin

Messages : 4881
Date d'inscription : 31/05/2009

Revenir en haut Aller en bas

Revenir en haut

- Sujets similaires

 
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum