l'esprit voyageur en asie du sud-est
Vous souhaitez réagir à ce message ? Créez un compte en quelques clics ou connectez-vous pour continuer.
-20%
Le deal à ne pas rater :
Ecran PC GIGABYTE 28″ LED M28U 4K ( IPS, 1 ms, 144 Hz, FreeSync ...
399 € 499 €
Voir le deal

Cambodge - Sortis de la rue

Aller en bas

Cambodge - Sortis de la rue Empty Cambodge - Sortis de la rue

Message  Admin Ven 15 Avr 2011 - 14:42

Sur le bas-côté de la route, un groupe de jeunes filles en tenue de football, chaussures à lacets et maillots jaunes, attendent le vieux pickup qui les conduira vers les cabanes en bois des rues boueuses de la lisière de la ville. Il est pas encore six heures du matin.

Nous sommes à Battambang, ville de 200 000 habitants à quelque 300 kilomètres à l’ouest de la capitale cambodgienne, Phnom Penh. Sina, le chauffeur, ne semble guère impressionné par le mauvais état de la route dont il connaît visiblement les moindres ornières. Après chaque halte du pickup devant un nouveau foyer ou orphelinat, les filles se serrent un peu plus sur la plateforme, vite surchargée et de plus en plus bruyante.

Au Cambodge, il n’y a pas que les routes qui sont sinueuses et difficiles. Pour la plus grande partie des 14,3 millions d’habitants, la vie quotidienne est un véritable combat. Bien que la province de Battambang soit connue comme le "bol de riz" du pays pour la fertilité de son sol, le revenu moyen par habitant ne dépasse pas les 1 800 riels (0,5 dollars) par jour.

Malgré d’indéniables améliorations sous Hun Sen, le Premier ministre cambodgien au pouvoir depuis 23 ans, certaines régions comme celle de Battambang gardent de profondes séquelles du régime khmer rouge qui avait procédé à la destruction systématique des écoles, des communautés et des familles. L’âge moyen de la population cambodgienne est de 22 ans et plus de la moitié d’entre elle est âgée de moins de 21 ans. Le taux de scolarisation est faible, surtout dans les provinces, et les aides à l’éducation sont insuffisantes.

Triste condition
Les filles sont les premières victimes de la dureté des faits. La pauvreté les oblige à travailler comme ouvrières agricoles, marchandes ambulantes, travailleuses occasionnelles ou à mendier. Il y aurait plus d’orphelins et d’enfants des rues au Cambodge que partout ailleurs, soit environ 20 000 selon les estimations de l’organisation Street Children.

De nombreux parents vendent leurs filles à des employeurs peu scrupuleux, sans se douter qu’ils les vouent ainsi à l’esclavage et à la prostitution forcée, illégalement sorties du pays par des trafiquants et transportées d’un lieu à un autre, sans espoir de jamais revoir leurs familles.

Les filles qui ont pris place à bord du pickup ont toutes été recueillies par des foyers et des organisations d’aide aux jeunes sans abri après de longues périodes de travail forcé ou d’autres terribles épreuves. Elles tentent de se reconstruire avec l’aide d’un jeune instituteur suisse qui s’est lancé par hasard dans cette aventure.

À la découverte du monde
Tout a commencé il y a une dizaine d’années, lorsque Sam Schweingruber, jeune enseignant suisse fraîchement diplômé de 24 ans, est arrivé au Cambodge dans l’idée d’élargir son horizon avant de plonger dans la vie active. "Je voulais voyager et voir le monde", explique-t-il à propos de ce premier voyage au Cambodge où il était arrivé après une étape en Inde et un séjour en Corée et au Japon pour la Coupe du Monde de la FIFA 2002.

Grand footballeur amateur, ayant déjà entraîné des enfants en Suisse et titulaire d’une licence d’entraîneur "B" de l’Association Suisse de Football, il décida de prolonger son séjour au Cambodge car comme il l’explique, "il s’est tout de suite passé beaucoup de choses ici." Il ne lui fallut pas longtemps pour passer milieu de terrain dans le championnat national de première division. Fort de sa grande taille, il remportait tous ses duels aériens. Son club Mild Seven lui donnait 30 dollars plus un paquet de cigarettes en guise de salaire mensuel.

Schweingruber fut ensuite rapidement nommé entraîneur mais au Cambodge, le football se résumait au championnat national de première division. L’équipe nationale masculine était 178ème au classement mondial et un seul entraîneur dans tout le pays détenait une licence "A". Le football de rue était peu structuré et aucun système de promotion du football juniors ni championnat juniors était en place.

À la rencontre des jeunes
Quelques années après l’arrivée de Schweingruber dans le pays, un incident allait changer le cours de sa vie et de celle de nombreux jeunes Cambodgiens. "J’avais l’habitude de me déplacer dans Phnom Penh en mobylette et un jour, alors que j’étais en train de discuter avec un ami, je me suis retourné et j’ai constaté que l’on m’avait volé mon casque", se souvient Schweingruber. "J’ai retrouvé le voleur, qui essayait de vendre mon casque, et je me suis aperçu qu’il était sous l’emprise de la drogue. Personne ne se souciait de lui ni de ce qu’il faisait."

Cette rencontre eut l’effet d’un détonateur pour Schweingruber, qui comprit alors qu’il pouvait être beaucoup plus utile au Cambodge que dans son pays natal. "À mon retour en Suisse, je n’arrêtais pas de me demander pourquoi il n’y avait pas de football des jeunes au Cambodge", se souvient-il. C’est ainsi qu’il décida de retourner là-bas pour proposer une alternative aux enfants et aux jeunes des rues.

En juin 2004, il constitua sa première équipe d’enfants des rues dans un coin de Phnom Penh où il avait failli écraser l’un d’entre eux avec son scooter. Il organisait ses entraînements tard le soir et il lui fallut du temps pour se faire accepter et finalement apprécier par les officiels du football local. En 2006 enfin, la fédération lui proposa un contrat pour développer le football juniors.

Salt pour cicactriser les blessures
Malheureusement, à la suite du changement de l’équipe dirigeante de la fédération le jour-même où Schweingruber aurait dû signer le contrat en question, le projet fut mis au placard. Décidant de prendre les choses en main, il déménagea à Battambang et y fonda une académie qu’il baptisa SALT - Sport and Leadership Training (formation dans le domaine du sport et du leadership).

Finançant lui-même l’achat des casquettes, ballons et maillots, il créa son propre championnat du week-end. Quinze équipes U-17 commencèrent la saison à l’automne 2006 et un an plus tard, les filles étaient elles aussi de la partie. Aujourd’hui, plus de 2 000 garçons et filles issues de trois provinces disputent plus de 500 matches par saison. Avant chacun d’entre eux, des travailleurs sociaux bénévoles donnent des cours de leadership, transmettant aux enfants des valeurs sociales et les sensibilisant à l’alcoolisme, à la drogue et à la criminalité.

Schweingruber eut bien du mal à convaincre les gens de l’utilité de son travail. "Je voulais montrer que le football ne se résumait pas à l’entraînement mais il est difficile de faire changer les mentalités. La plupart des parents considéraient toujours le sport comme une perte de temps, comme quelque chose d’inutile." Comme les femmes ont encore un bas statut au Cambodge, Schweingruber a créé des groupes d’entraînement spécifiques pour les filles. "Au Cambodge, on empêche très souvent les jeunes filles d’acquérir leur autonomie et de suivre leur propre voie comme nous le faisons nous. Par notre travail, nous montrons que les filles forcent elles aussi le respect."

La patience de Schweingruber a porté ses fruits. SALT s’est développé et compte aujourd’hui des équipes de garçons U-11, U-13 et U-16, une équipe masculine seniors qui participe à des tournois nationaux ainsi que des équipes de filles U-13 et U-16. Devenu instructeur de football de base de la FIFA, Schweingruber est également spécialiste du football féminin cambodgien si bien que lorsque le Cambodge a été invité à disputer son premier match féminin international au Laos au printemps 2009, il a tout naturellement été désigné sélectionneur de l’équipe nationale féminine. Il occupe toujours ce poste, mais tient à préciser que celui-ci ne peut être comparé à un poste de sélectionneur national à plein temps compte tenu du caractère spontané et sporadique des entraînements de l’équipe.

Succès personnels
Au delà des résultats individuels des équipes, les succès personnels ont été nombreux. Lors de son premier voyage au Laos sponsorisé par la FIFA, l’équipe cambodgienne comptait par exemple dans ses rangs Nin et Vesna, deux jeunes soeurs qui avaient fait leurs classes à l’académie de football SALT après avoir connu l’exploitation et la prostitution forcée en Thaïlande. Rapidement titularisée dans l’équipe avec sa soeur, Nin porte même aujourd’hui le brassard de capitaine. De plus, elle a été formée comme instructrice lors des séminaires d’entraînement de Schweingruber et gagne désormais sa vie comme entraîneur.

"Avant de découvrir SALT, je ne riais pas souvent. Depuis trois ans que je joue au football, je retrouve goût à la vie", explique Nin. De tels témoignages sont un bel hommage au travail réalisé par l’académie de football SALT et par son fondateur depuis sept ans. "Ironie du sort, mes parents n’ont jamais voulu me laisser jouer au football car ils pensaient qu’il aurait une mauvaise influence sur moi, en particulier sur mon éducation", confie Schweingruber en souriant. "Aujourd’hui, j’ai prouvé ici au Cambodge que le football et l’éducation pouvaient être complémentaires."

"Quand j’enseignais en Suisse, j’ai toujours été intéressé par le rôle éducatif du football et je me demandais comment dépasser le simple fait de taper dans un ballon mais depuis que je suis au Cambodge, je suis passé à un tout nouveau stade. J’ai découvert que le football pouvait changer radicalement la vie des enfants. Les ligues dans lesquelles évoluent les enfants et la composante éducative introduite par l’académie dépassent naturellement tout ce que nous pouvions espérer au départ mais le principe reste le même : il s’agit de changer les perspectives des enfants défavorisés simplement en leur donnant la possibilité de jouer."

http://fr.fifa.com/aboutfifa/worldwideprograms/news/newsid=1418539.html
Admin
Admin
Admin

Messages : 4881
Date d'inscription : 31/05/2009

Revenir en haut Aller en bas

Revenir en haut

- Sujets similaires

 
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum