l'esprit voyageur en asie du sud-est
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Sur la route de Mandalay

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Sur la route de Mandalay  Empty Sur la route de Mandalay

Message  Admin Mer 6 Juin 2012 - 6:07



Having long been closed off to the outside world, Burma is now lifting the curtain and making staggering democratic reforms. But will the regime really pass power to its people in the upcoming elections?

For years Burma has been ruled by a corrupt military junta that brutally suppressed all opposition, used forced labour and imprisoned thousands for their political views. But recently - and suddenly - things have changed. After elections that most observers regarded as a sham, the new government released Aung San Suu Kyi, suspended a hugely unpopular dam project with China, freed thousands of prisoners and signed peace pacts with a number of warring ethnic groups. Even Hillary Clinton dropped in for a visit. Ko Ko Hlaing, the President's Chief Advisor, admits the sins of the past and insists that Burma is now heading in a new direction. "We need credibility and we need legitimacy and we need to make trust between the people and the government". It's still early days for the reform process and whether the regime actually passes power to the people will be the ultimate test. For tourism at least, the changes have already proved to be a huge draw. "I wanted to be here right now to spend my tourism dollars in those changes and I also wanted to you know really see for myself what's going on".

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March 2012

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Sur la route de Mandalay  Empty Mandalay, ville royale et rebelle

Message  Admin Jeu 2 Aoû 2012 - 7:19

Le journaliste birman Aung Zaw, de retour dans son pays après vingt-quatre ans d'exil, évoque le passé de l'ancienne capitale royale. L'occasion aussi de se confronter aux enjeux des récents changements politiques.

Lors de mon récent séjour en Birmanie [en février, pour la première fois depuis 1988], je me suis rendu à Mandalay, la deuxième ville du pays. Nous avons décidé de faire la route depuis Rangoon [600 km séparent les deux villes] plutôt que de prendre l'avion. Une manière de mieux apprécier les paysages, les gens et les conditions de vie.
J'avais la nostalgie de Mandalay – de ses pagodes, de la ville fortifiée avec ses magnifiques douves, de ses calèches, de son célèbre marché Zecho, mais aussi de sa population chaleureuse et des ethnies qui descendent du plateau Shan [à plus de 1 000 mètres d'altitude]. Quand j'étais jeune, nous allions parfois avec ma famille dans le centre du pays visiter des parents à Mandalay, à Sagaing [à 100 km à l'ouest de Mandalay] et à Mogok [à 200 km au nord de Mandalay et célèbre pour ses mines de rubis].

Mandalay a été construite à partir de 1857 par le roi Mindon. Le monarque avait alors décidé de transférer sa capitale d'Amapura vers un nouveau site, au pied de la colline de Mandalay. Des raisons tactiques ont motivé ce choix, même si le roi, extrêmement fier, ne l'a jamais reconnu publiquement. L'ancienne capitale, construite sur le fleuve Irrawaddy, était trop exposée aux invasions des colonisateurs étrangers. A cette époque, la Basse-Birmanie [la région de Rangoon] était déjà occupée par les Britanniques.

Mindon était un monarque réformateur : il a fait construire des usines modernes, envoyé de jeunes érudits en Europe pour y poursuivre leurs études et ordonné la mise au point d'une version birmane du code morse. Le roi a également dépêché des ambassadeurs dans les pays voisins et les grandes puissances occidentales pour établir des relations diplomatiques et signer des accords d'amitié.

Il a publié le premier journal et introduit l'une des législations des médias les plus progressistes de l'Asie du Sud-Est en matière de média. C'est à lui que l'on doit les célèbres paroles : "Si j'agis mal, écrivez sur moi. Si les reines agissent mal, écrivez sur elles. Si mes fils et mes filles agissent mal, écrivez sur eux. Si les juges et les maires agissent mal, écrivez sur eux. Nul ne peut s'en prendre aux journalistes pour avoir exprimé la vérité. Ils doivent pouvoir circuler librement dans le palais."

Le roi et sa cour lisaient les journaux publiés en Basse-Birmanie, alors sous domination britannique, et ils étaient très sensibles à la critique. Quand la Rangoon Gazette a écrit sur le mauvais état des routes de Mandalay, les ministres de Mindon ont immédiatement ordonné leur entretien.

A partir de 1885, date à laquelle les Britanniques ont pris le contrôle de tout le pays, la vie dans la grande ville du nord a changé : les ministres qui avaient servi le roi se sont retirés ou sont devenus conseillers des nouveaux dirigeants étrangers. Les soldats fidèles au monarque ont pris le maquis pour préparer la rébellion contre le pouvoir colonial. La ville n'était plus la Naypyidaw (résidence des rois birmans) [nom donné par la junte à la capitale construite de toutes pièces dans la jungle en 2005], mais une simple bourgade de province rebaptisée Fort Dufferin par les Britanniques. La capitale birmane avait été transférée à Rangoon.

Après l'indépendance, Mandalay a été reconstruite, mais elle n'a jamais retrouvé la place qui était la sienne autrefois. Comme du temps de la domination britannique, des soldats étaient stationnés dans le palais et à l'intérieur du fort. Je me souviens d'avoir visité le palais dans les années 1980 et de les voir déambuler autour des édifices délabrés et du lac où le roi et ses épouses allaient se reposer. Rien n'avait été fait pour restaurer le palais et la gloire passée de la Birmanie.

Le général Ne Win, l'homme fort de la dictature entre 1962 et 1988, se rendait souvent en Haute-Birmanie [régions du centre et du nord du pays] et, à chaque fois, il faisait une halte à Mandalay et séjournait dans le palais. Non seulement il y rencontrait des responsables civils et militaires de la ville, mais il y invitait d'éminents intellectuels. Je me demande ce à quoi il pouvait penser. Il a été un des héros de l'indépendance qui ont combattu les Britanniques et les Japonais, mais on se souvient davantage de lui pour sa "voie birmane du socialisme", un mélange de marxisme et de bouddhisme qui s'est avéré désastreux pour le pays.

Ne Win est devenu très impopulaire et se comportait comme un seigneur de la guerre des temps féodaux. Superstitieux et paranoïaque, il croyait en la numérologie et a fini par vivre en reclus, se méfiant de tout le monde et s'enfermant loin des réalités du monde extérieur.


Mandalay a toujours été vigilante et sensible aux problèmes politiques. Je me souviens que, durant le soulèvement de Rangoon, en 1988 [de vastes manifestations étudiantes, auxquelles l'auteur a participé, pour demander l'instauration de la démocratie ont été réprimées dans le sang], les étudiants ont immédiatement fait appel à leurs camarades du Nord. Même si, au départ, cette ville somnolente et tranquille ne s'est pas sentie concernée, elle a fini par réagir. La rébellion a été exemplaire : les habitants et les moines de Mandalay ont manifesté leur courage et défié les autorités. Au mois de juillet, Ne Win, tombé en disgrâce, a perdu le pouvoir.

Mais la situation ne s'est pas améliorée pour autant. Ceux qui ont succédé à Ne Win étaient aussi inflexibles, bornés et tyranniques que lui, manquant de compétences pour gouverner et affichant une grande cruauté. Certains généraux ont vu en Mandalay un instrument qui pourrait leur être utile pour promouvoir le nationalisme. Ils ont décidé de reconstruire le palais – à la grande consternation des historiens – et, en quelques années, de nombreux édifices ont été rénovés par des milliers de civils et de prisonniers obligés de contribuer à l'embellissement du Golden Myanmar [en référence au slogan imaginé par les autorités pour attirer les touristes] en restaurant les douves et les murailles de la ville.

Mais Mandalay a poursuivi la rébellion : dans les années 1990, ses moines ont bravé les généraux et refusé de recevoir l'aumône des membres des forces armées birmanes. Furieuse, la junte a ordonné l'assaut contre plus de 130 monastères de la ville, et un grand nombre de moines ont été emprisonnés.

Une grande nostalgie m'a saisi en revoyant la ville. C'est une cité où l'on peut aisément imaginer des fantômes se racontant des histoires du passé. Mais les temps évoluent et nous sommes à la veille de grands changements. Ainsi, à notre arrivée dans un petit hôtel du centre-ville, j'ai aperçu un panneau touristique écrit en birman et en mandarin. Plusieurs Chinois étaient assis dans le hall et les filles de la réception leur parlaient en chinois. Ils s'exprimaient aussi bien que dans leur propre langue.

Un peu plus tard, j'ai rencontré l'écrivain Nyi Pu Lay, le fils de Ludu U Hla [mort en 1982] et Daw Amar [décédée en 2008], tous deux étaient des écrivains et ont été emprisonnés pour des raisons politiques. Il m'a expliqué que les nouveaux immigrés chinois qui arrivent à Mandalay tendent à vivre dans de luxueuses résidences et ne s'intègrent pas au reste de la population. Apparemment, beaucoup viennent du sud de la Chine et s'achètent des papiers d'identité birmans. A Lashio, dans l'Etat de Shan, on les accuse même de vouloir contrôler la ville. Ce sentiment, très répandu dans le nord du pays, marque une nouvelle étape dans l'histoire de Mandalay. Au cours de ce voyage, je n'ai pu échapper au débat sur la forte influence de la Chine dans notre pays. Même la célèbre troupe Par Par Lay [une troupe d'humoristes de Mandalay] plaisante sur la manière dont la Chine s'empare des ressources birmanes. Et, de toute évidence, un sentiment de xénophobie couve chez les jeunes vis-à-vis des prospères voisins du Nord.

Au terme de ce voyage, de nombreuses questions restent sans réponse. Comment la Birmanie vivra-t-elle la prochaine décennie ? Comment préservera-t-elle sa souveraineté et son territoire ? La soirée passée à discuter dans un restaurant de Mandalay avec des jeunes Birmans m'a malheureusement valu une nuit d'insomnie.

http://www.courrierinternational.com/article/2012/07/27/mandalay-ville-royale-et-rebelle

L'auteur
Aung Zaw distille d'une plume alerte des analyses acérées sur la Birmanie depuis plus de vingt ans. En 1988, il rejoint le mouvement de contestation contre la dictature alors qu'il étudie la botanique. Emprisonné quelques mois, il fuit en Thaïlande pour échapper à une nouvelle arrestation. En 1993, il fonde le magazine The Irrawaddy, devenu au fil des années une référence incontournable pour ceux qui veulent suivre l'actualité birmane. En février 2012, il a pu pour la première fois retourner en Birmanie et témoigner de la transition politique en cours depuis dix-huit mois.
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