Le labyrinthe ethnique - 135 ethnies pour 51 millions d'habitants
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Le labyrinthe ethnique - 135 ethnies pour 51 millions d'habitants
Pour comprendre ----> http://www.birmanie.ch/resources/cartes_et_graphes/cartemyanmar.pdf
Un tiers des Birmans est issu des minorités
Dans ce pays que l'ex-junte a qualifié de Myanmar, et que beaucoup appellent toujours Birmanie, environ deux tiers de la population, estimée par les Nations unies à 55 millions d'âmes, sont d'ethnie birmane (Bamar). Le tiers restant est issu de minorités comme les Shans, les Karens ou les Kachins. Ces groupes minoritaires vivent sur 60% du territoire, dans de vastes régions de montagne et de jungle. Celles-ci regorgent de ressources naturelles (minéraux, bois, eau) et enserrent d'ouest en est, le long des frontières, la plaine centrale occupée en majorité par les Bamars
Les historiens décrivent trois principales vagues d'immigration qui, dès le IIIème siècle avant notre ère, ont constitué l'identité ethnique et culturelle de la future Birmanie (Môns, Tibéto-Birmans, Tais - Shans). Au XIXème siècle, le colonisateur britannique partage en deux l'administration du pays: l'Inde britannique se charge de la "Birmanie proprement dite" (Burma Proper) et accorde à la "Birmanie Extérieure" (les minorités) une large autonomie de gestion. Karens, Kachins et autres Chins sont incorporés à l'armée britannique, aux dépens des Bamars ; les combattants issus des minorités, à la féroce réputation, contribuent en 1941 à la défaite de l'envahisseur japonais, pourtant soutenu jusqu'en 1944 par Aung San, héros de l'indépendance et père d'Aung San Suu Kyi. Cette alliance exacerbe l'animosité voire la haine développée au cours des siècles entre les groupes minoritaires et la majorité bamar. Ce sentiment s'était également construit sur le particularisme religieux: à l'exception notable des Shans, les ethnies minoritaires sont en partie christianisées, tandis que la majorité bamar est adepte du bouddhisme.
En 1947, dans le cadre de l'indépendance négociée avec Londres, Aung San signe avec les représentants de trois groupes ethniques (Chins, Kachins, Shans) l'accord de Panglong. Celui-ci ouvre la voie à un Etat indépendant pour les Kachins et à l'autonomie pour les autres. Mais le texte comporte un gros défaut: il exclue de facto les autres groupes (Arakanais, Karens, Môns, etc). L'assassinat d'Aung San en 1947, quelques mois avant le 4 janvier 1948, date de l'indépendance, et la prise du pouvoir par les militaires en 1962, précipitent cet accord aux oubliettes.
L'exaltation des premiers jours de l'indépendance dissipée, des groupes de résistance armée ethniques (Arakanais, Karens) et communistes prennent les armes contre le jeune gouvernement. Prévue par la Constitution de 1948, la création d'Etats ethniques, n'y change rien, d'autant qu'ils ne jouissaient en réalité d'aucun pouvoir réel. "On entendait les bruits de canon à la périphérie de Rangoon, se souvient un vieux résident de l'ancienne capitale. Les Karens étaient aux portes de la ville, on n'osait pas sortir." Déchirés par leurs divisions internes, les mouvements irrédentistes ne parviennent pas à profiter de l'occasion historique ainsi créée. Pis, dans les années 1970, la Tatmadaw met en oeuvre une implacable stratégie dite des "Quatre coupures" et prive les insurgés armés d'accès à l'alimentation et aux sources de financement. Karens et communistes sont peu à peu repoussés dans les zones montagneuses frontalières, au prix d'une terrible répression.
De vastes portions de territoires isolés sont depuis lors devenus le théâtre d'impitoyables campagnes d'épuration ethnique. L'armée a systématiquement recours au meurtre, au viol, à la destruction et au travail forcé; certains groupes ethniques se livrent aussi à des exactions, aux dépens d'une population civile qu'ils prétendent protéger. Aujourd'hui encore, la discrimination ethnique est institutionnalisée, y compris dans les régions pacifiées: les citoyens issus de minorités ont un accès restreint à la hiérarchie militaire, à l'administration publique et à l'enseignement supérieur.
Au cours des décennies, plusieurs millions de personnes, Bamars inclus, ont été contraintes de quitter leur maison pour se réinstaller ailleurs, bon nombre dans des communautés de "relocalisation" placées sous le contrôle de l'armée. Celle-ci, au prétexte d'ôter aux territoires ethniques tout soutien des mouvements armés, en profite pour mettre la main sur les richesses naturelles: peu à peu, les commandants des divisions régionales se constituent des petits empires quasi autonomes. Les mutations sont très convoitées dans l'Etat Shan, en particulier, où des seigneurs de guerre contrôlent la production et le commerce de drogues illicites: opium, héroïne, métamphétamine. Des hordes de déplacés trouvent refuge dans des camps en Thaïlande (près de 150 000 en 2012) et au Bangladesh, où s'installent plus de 200 000 Rohingyas, une minorité musulmane.
Dès 1989, la junte, passée maître dans la stratégie du "diviser pour mieux régner", conclut des accords de cessez-le-feu avec 17 mouvements armés dont les Kachins, les Môns et le Parti communiste Birman (constitué essentiellement de Was, une minorité Shan). Grand ordonnateur de ces accords, verbaux pour la plupart, le général Khin Nyunt est alors l'influent chef des services de renseignement. En échange d'un abandon de la lutte armée et d'un partage des ressources économiques, il leur propose de garder leur nom, leur arsenal et une partie de leur territoire. Des dirigeants de ces groupes ethniques et leur clan profiteront d'ailleurs largement de ces accords, au grand dam des civils.
Une fédération improbable
Aujourd'hui, le bilan des années de cessez-le-feu suscite l'amertume. "Il n'y en n'a eu que pour le business, nous n'avons rien obtenu sur le plan politique comme on nous l'avait promis", se plaint le général Gun Maw, commandant en second de la KIA, se faisant l'écho des autres minorités. Celles-ci ont pourtant abandonné leurs revendications d'indépendance. Elles réclament une forme de structure fédérale qui garantisse le respect de leurs droits et de leur culture, ainsi qu'un contrôle sur l'exploitation des ressources naturelles. Seulement voilà, aux yeux d'une hiérarchie militaire ethnocentrique, voire xénophobe, le mot fédération est synonyme d'éclatement du pays. Les populations ethniques reprochent également au gouvernement d'avoir vendu leur territoire à des puissances étrangères, en particulier aux voisins chinois et thaïlandais.
En 2009, soucieuse de régler enfin le dossier ethnique avant les élections de novembre 2010, la junte enjoint aux organisations signataires de cessez-le-feu de se transformer en milices gardes-frontière sous les ordres d'officiers birmans. La plupart des groupes refusent, et les dictateurs menacent de passer à l'offensive. Les élections se déroulent comme prévu et de nouvelles institutions sont mises en place. Mais l'imbroglio ethnique subsiste. Après des mois de flottement, les hostilités reprennent chez les Kachins et dans une partie des Etats Shan et Karen, avec pour conséquence leur lot de personnes déplacées et d'exactions contre les civils.
En août 2011, Thein Sein tend " un rameau d'olivier " aux minorités armées en leur proposant des négociations région par région. " Une fois de plus, il s'agit d'une approche individuelle, se plaint Nai Hantar, secrétaire général du New Mon State Party (NMSP). Le gouvernement tente de négocier séparément, ainsi il pourra dire : ''Vous voyez, nous avons obtenu la paix dans les zones ethniques''. Nous, nous voulons parler d'une seule voix ". Pour la première fois, des mouvements armés signataires et non signataires du cessez-le-feu s'allient au sein d'une organisation commune, le United Nationalities Federal Council (UNFC, Conseil fédéral unifié des nationalités). Las, ce groupe est lui-même divisé et d'un poids limité face au bloc militaire birman. D'autant que la United Wa State Army (UWSA), le groupe le plus puissant avec une armée estimée à 20 000 hommes, sous forte influence chinoise, s'est démarqué de l'UNFC en prolongeant sine die les termes du cessez-le-feu de 1989.
Pourtant, la plupart des observateurs en sont convaincus, tenter de résoudre le conflit ethnique par les armes serait très coûteux et... sans garantie de succès.
Comment résoudre le conflit ethnique?
Ces derniers mois, les émissaires de Thein Sein ont multiplié les rencontres avec la plupart des groupes ethniques. Plusieurs accords préliminaires de cessez-le-feu ont été conclus, notamment avec deux mouvements shans et les Chins, mais surtout avec la Karen National Union (KNU), en lutte depuis soixante-trois ans. Ces accords doivent maintenant être consolidés selon un calendrier et des modalités précis. Sur le terrain, ils restent fragiles et suscitent souvent le scepticisme parmi la population et les officiers rebelles locaux. Saw Htoo Sar, commandant en second d'une compagnie de la Karean National Liberation Army (KNLA, bras armé de la KNU) qui opère dans le nord ouest de l'Etat Karen, n'en démord pas: "Les Birmans nous ont toujours menti, il n'y a aucune raison de leur faire confiance. Pas plus aujourd'hui qu'auparavant".
Quant à Aung San Suu Kyi, elle s'est dite "prête à faire tout ce qui est en [son] pouvoir en faveur de la cessation des conflits armés". Officiellement, la plupart des groupes ethniques lui apportent leur soutien. Mais ils savent qu'elle ne peut à elle seule résoudre tous les dossiers sensibles de son pays. Dans le privé, certains soulignent son manque de connaissance des réalités ethniques et se montrent dubitatifs sur sa marge de manoeuvre. Bwe Wa, administrateur KNU d'un groupe de villages dans le nord de l'Etat Karen, résume une opinion partagée par nombre de ses pairs: "Elle ne peut pas faire grand-chose maintenant. Les militaires l'ont libérée afin de s'assurer un répit politique; ils l'utilisent".
La mise en oeuvre de ces accords constituera un test majeur de la réelle influence de Thein Sein auprès de ses anciens collègues de l'armée. A ce titre, les derniers développements sont peu encourageants. Ses injonctions à la Tatmadaw de cesser les combats chez les Kachins sont restées lettre morte. Certains voient déjà les signes avant-coureurs d'une inquiétante évolution à deux vitesses: les régions à majorité birmane seraient "normalisées" sous la houlette des "réformateurs civils", pendant que les territoires ethniques continueraient d'être exploités par des faucons de l'armée.
Thierry Falise
http://www.lexpress.fr/
Un tiers des Birmans est issu des minorités
Dans ce pays que l'ex-junte a qualifié de Myanmar, et que beaucoup appellent toujours Birmanie, environ deux tiers de la population, estimée par les Nations unies à 55 millions d'âmes, sont d'ethnie birmane (Bamar). Le tiers restant est issu de minorités comme les Shans, les Karens ou les Kachins. Ces groupes minoritaires vivent sur 60% du territoire, dans de vastes régions de montagne et de jungle. Celles-ci regorgent de ressources naturelles (minéraux, bois, eau) et enserrent d'ouest en est, le long des frontières, la plaine centrale occupée en majorité par les Bamars
Les historiens décrivent trois principales vagues d'immigration qui, dès le IIIème siècle avant notre ère, ont constitué l'identité ethnique et culturelle de la future Birmanie (Môns, Tibéto-Birmans, Tais - Shans). Au XIXème siècle, le colonisateur britannique partage en deux l'administration du pays: l'Inde britannique se charge de la "Birmanie proprement dite" (Burma Proper) et accorde à la "Birmanie Extérieure" (les minorités) une large autonomie de gestion. Karens, Kachins et autres Chins sont incorporés à l'armée britannique, aux dépens des Bamars ; les combattants issus des minorités, à la féroce réputation, contribuent en 1941 à la défaite de l'envahisseur japonais, pourtant soutenu jusqu'en 1944 par Aung San, héros de l'indépendance et père d'Aung San Suu Kyi. Cette alliance exacerbe l'animosité voire la haine développée au cours des siècles entre les groupes minoritaires et la majorité bamar. Ce sentiment s'était également construit sur le particularisme religieux: à l'exception notable des Shans, les ethnies minoritaires sont en partie christianisées, tandis que la majorité bamar est adepte du bouddhisme.
En 1947, dans le cadre de l'indépendance négociée avec Londres, Aung San signe avec les représentants de trois groupes ethniques (Chins, Kachins, Shans) l'accord de Panglong. Celui-ci ouvre la voie à un Etat indépendant pour les Kachins et à l'autonomie pour les autres. Mais le texte comporte un gros défaut: il exclue de facto les autres groupes (Arakanais, Karens, Môns, etc). L'assassinat d'Aung San en 1947, quelques mois avant le 4 janvier 1948, date de l'indépendance, et la prise du pouvoir par les militaires en 1962, précipitent cet accord aux oubliettes.
L'exaltation des premiers jours de l'indépendance dissipée, des groupes de résistance armée ethniques (Arakanais, Karens) et communistes prennent les armes contre le jeune gouvernement. Prévue par la Constitution de 1948, la création d'Etats ethniques, n'y change rien, d'autant qu'ils ne jouissaient en réalité d'aucun pouvoir réel. "On entendait les bruits de canon à la périphérie de Rangoon, se souvient un vieux résident de l'ancienne capitale. Les Karens étaient aux portes de la ville, on n'osait pas sortir." Déchirés par leurs divisions internes, les mouvements irrédentistes ne parviennent pas à profiter de l'occasion historique ainsi créée. Pis, dans les années 1970, la Tatmadaw met en oeuvre une implacable stratégie dite des "Quatre coupures" et prive les insurgés armés d'accès à l'alimentation et aux sources de financement. Karens et communistes sont peu à peu repoussés dans les zones montagneuses frontalières, au prix d'une terrible répression.
De vastes portions de territoires isolés sont depuis lors devenus le théâtre d'impitoyables campagnes d'épuration ethnique. L'armée a systématiquement recours au meurtre, au viol, à la destruction et au travail forcé; certains groupes ethniques se livrent aussi à des exactions, aux dépens d'une population civile qu'ils prétendent protéger. Aujourd'hui encore, la discrimination ethnique est institutionnalisée, y compris dans les régions pacifiées: les citoyens issus de minorités ont un accès restreint à la hiérarchie militaire, à l'administration publique et à l'enseignement supérieur.
Au cours des décennies, plusieurs millions de personnes, Bamars inclus, ont été contraintes de quitter leur maison pour se réinstaller ailleurs, bon nombre dans des communautés de "relocalisation" placées sous le contrôle de l'armée. Celle-ci, au prétexte d'ôter aux territoires ethniques tout soutien des mouvements armés, en profite pour mettre la main sur les richesses naturelles: peu à peu, les commandants des divisions régionales se constituent des petits empires quasi autonomes. Les mutations sont très convoitées dans l'Etat Shan, en particulier, où des seigneurs de guerre contrôlent la production et le commerce de drogues illicites: opium, héroïne, métamphétamine. Des hordes de déplacés trouvent refuge dans des camps en Thaïlande (près de 150 000 en 2012) et au Bangladesh, où s'installent plus de 200 000 Rohingyas, une minorité musulmane.
Dès 1989, la junte, passée maître dans la stratégie du "diviser pour mieux régner", conclut des accords de cessez-le-feu avec 17 mouvements armés dont les Kachins, les Môns et le Parti communiste Birman (constitué essentiellement de Was, une minorité Shan). Grand ordonnateur de ces accords, verbaux pour la plupart, le général Khin Nyunt est alors l'influent chef des services de renseignement. En échange d'un abandon de la lutte armée et d'un partage des ressources économiques, il leur propose de garder leur nom, leur arsenal et une partie de leur territoire. Des dirigeants de ces groupes ethniques et leur clan profiteront d'ailleurs largement de ces accords, au grand dam des civils.
Une fédération improbable
Aujourd'hui, le bilan des années de cessez-le-feu suscite l'amertume. "Il n'y en n'a eu que pour le business, nous n'avons rien obtenu sur le plan politique comme on nous l'avait promis", se plaint le général Gun Maw, commandant en second de la KIA, se faisant l'écho des autres minorités. Celles-ci ont pourtant abandonné leurs revendications d'indépendance. Elles réclament une forme de structure fédérale qui garantisse le respect de leurs droits et de leur culture, ainsi qu'un contrôle sur l'exploitation des ressources naturelles. Seulement voilà, aux yeux d'une hiérarchie militaire ethnocentrique, voire xénophobe, le mot fédération est synonyme d'éclatement du pays. Les populations ethniques reprochent également au gouvernement d'avoir vendu leur territoire à des puissances étrangères, en particulier aux voisins chinois et thaïlandais.
En 2009, soucieuse de régler enfin le dossier ethnique avant les élections de novembre 2010, la junte enjoint aux organisations signataires de cessez-le-feu de se transformer en milices gardes-frontière sous les ordres d'officiers birmans. La plupart des groupes refusent, et les dictateurs menacent de passer à l'offensive. Les élections se déroulent comme prévu et de nouvelles institutions sont mises en place. Mais l'imbroglio ethnique subsiste. Après des mois de flottement, les hostilités reprennent chez les Kachins et dans une partie des Etats Shan et Karen, avec pour conséquence leur lot de personnes déplacées et d'exactions contre les civils.
En août 2011, Thein Sein tend " un rameau d'olivier " aux minorités armées en leur proposant des négociations région par région. " Une fois de plus, il s'agit d'une approche individuelle, se plaint Nai Hantar, secrétaire général du New Mon State Party (NMSP). Le gouvernement tente de négocier séparément, ainsi il pourra dire : ''Vous voyez, nous avons obtenu la paix dans les zones ethniques''. Nous, nous voulons parler d'une seule voix ". Pour la première fois, des mouvements armés signataires et non signataires du cessez-le-feu s'allient au sein d'une organisation commune, le United Nationalities Federal Council (UNFC, Conseil fédéral unifié des nationalités). Las, ce groupe est lui-même divisé et d'un poids limité face au bloc militaire birman. D'autant que la United Wa State Army (UWSA), le groupe le plus puissant avec une armée estimée à 20 000 hommes, sous forte influence chinoise, s'est démarqué de l'UNFC en prolongeant sine die les termes du cessez-le-feu de 1989.
Pourtant, la plupart des observateurs en sont convaincus, tenter de résoudre le conflit ethnique par les armes serait très coûteux et... sans garantie de succès.
Comment résoudre le conflit ethnique?
Ces derniers mois, les émissaires de Thein Sein ont multiplié les rencontres avec la plupart des groupes ethniques. Plusieurs accords préliminaires de cessez-le-feu ont été conclus, notamment avec deux mouvements shans et les Chins, mais surtout avec la Karen National Union (KNU), en lutte depuis soixante-trois ans. Ces accords doivent maintenant être consolidés selon un calendrier et des modalités précis. Sur le terrain, ils restent fragiles et suscitent souvent le scepticisme parmi la population et les officiers rebelles locaux. Saw Htoo Sar, commandant en second d'une compagnie de la Karean National Liberation Army (KNLA, bras armé de la KNU) qui opère dans le nord ouest de l'Etat Karen, n'en démord pas: "Les Birmans nous ont toujours menti, il n'y a aucune raison de leur faire confiance. Pas plus aujourd'hui qu'auparavant".
Quant à Aung San Suu Kyi, elle s'est dite "prête à faire tout ce qui est en [son] pouvoir en faveur de la cessation des conflits armés". Officiellement, la plupart des groupes ethniques lui apportent leur soutien. Mais ils savent qu'elle ne peut à elle seule résoudre tous les dossiers sensibles de son pays. Dans le privé, certains soulignent son manque de connaissance des réalités ethniques et se montrent dubitatifs sur sa marge de manoeuvre. Bwe Wa, administrateur KNU d'un groupe de villages dans le nord de l'Etat Karen, résume une opinion partagée par nombre de ses pairs: "Elle ne peut pas faire grand-chose maintenant. Les militaires l'ont libérée afin de s'assurer un répit politique; ils l'utilisent".
La mise en oeuvre de ces accords constituera un test majeur de la réelle influence de Thein Sein auprès de ses anciens collègues de l'armée. A ce titre, les derniers développements sont peu encourageants. Ses injonctions à la Tatmadaw de cesser les combats chez les Kachins sont restées lettre morte. Certains voient déjà les signes avant-coureurs d'une inquiétante évolution à deux vitesses: les régions à majorité birmane seraient "normalisées" sous la houlette des "réformateurs civils", pendant que les territoires ethniques continueraient d'être exploités par des faucons de l'armée.
Thierry Falise
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