"Les leaders nous ont laissés tomber, mais la lutte continue !"
5 participants
Page 1 sur 1
"Les leaders nous ont laissés tomber, mais la lutte continue !"
Ecœurés par le mépris et l’arrogance affichés par les autorités et la lâcheté de leurs leaders, de nombreux manifestants Chemises rouges sont rentrés chez eux, hier, après avoir mis à sac de nombreux endroits de la capitale. Mais pour beaucoup, le combat pour la réduction des inégalités n’est pas terminé. Ce n’est peut-être même qu’un début…
Au lendemain de l’opération militaire sur le site de manifestation des Chemises rouges qui a mis fin à plus de deux mois de rassemblement dans Bangkok, l’évacuation des manifestants réfugiés dans le temple Pathum Wanaram aura constitué l’un des moments bouleversants, qui s’est ajouté aux images de désolation du quartier tout entier.
Après une nuit que beaucoup ont décrite comme terrifiante, un millier de personnes qui étaient venues se cacher là pensant être en sécurité, sont sorties, vers 8h du matin, en suivant le couloir formé par des policiers menant au quartier général de la police situé juste de l’autre côté de la rue. Pour l’essentiel des femmes et des personnes âgées, ils ont avancé dans un silence funèbre - beaucoup exprimant une grande émotion plaquée sur le visage, certains les larmes aux yeux, d’autres pétrifiés ou sans expression - jusqu’à la cour de rassemblement qui fait face au temple pour aller s’asseoir en groupe après avoir été fouillés par les policiers. Là, ils devaient attendre encore quelques heures que des bus de ville viennent les chercher pour les amener 500 mètres plus loin, près du stade National (Supachalasai), où ils devaient s’enregistrer avant d'embarquer dans d'autres bus pour rentrer chez eux.
Forte tension émotionnelle
Cette émotion était pour beaucoup teintée de terreur, de colère et d’incompréhension.
Tout d'abord la terreur de la nuit passée dans le temple. Une femme d’une cinquantaine d’année raconte que, vers quatre heures du matin, des affrontements violents ont eu lieu autour du temple, et que 6 personnes ont été tuées dans l’enceinte même du lieu de culte, ce que confirmera dans la journée les experts de la police scientifique. "C’était terrifiant, dit-elle, nous avions très peur".
La colère et l’incompréhension viennent manifestement du sentiment que Bangkok les rejette complètement, définitivement. Le Bangkok du gouvernement qu'ils considèrent illégitime pour avoir pris la place de leur élu à la faveur d'un coup d'Etat et de violences perpétrées par leurs opposants restées impunies à ce jour. Le Bangkok de la classe moyenne qui méprise généralement les provinciaux, tout particulièrement les Issanais. Le Bangkok des leaders du mouvement et du parti politique qui les ont abandonnés à leur propre sort après les avoir utilisés. "Ce ne sont pas que des casseurs qui ont brulé les bâtiments, nous avoue Ball, un étudiant de 25 ans qui a passé plusieurs semaines avec le mouvement. Ce sont les gens, de simples fermiers pour certains, car ils sont en colère, ils sont écœurés".
Assises depuis plus de 5 heures dans la cour du quartier général de la police, une femme de soixante-dix ans explose de colère. "Ils sont où ces gens qui nous ont tout promis ! Ils nous ont demandé de venir à Bangkok pour défendre la démocratie et réduire les inégalités et ils abandonnent la lutte au premier danger. Ils nous ont promis qu’ils s’occuperaient de nous, disant que l’on pouvait quitter nos foyers pendant plusieurs jours, qu’ils couvriraient nos dépenses, et ils nous laissent aujourd’hui ici sans rien. Ils nous ont dit que nous pouvions nous réfugier dans le temple, que nous y serions en sécurité, et six de nos amis sont morts devant nous, ajoute la dame, blessée légèrement au ventre par une balle. Qu’ils aillent au diable !"
Pour autant, le combat des Chemises rouges ne semble pas terminé. "Pour l’instant, les gens ont tout laissé là-bas (Ratchaprasong), leur esprit, leurs affaires, leur enthousiasme, etc. Ils n’ont ramené que leur propre corps à la maison, nous dit Ball. Mais il va y avoir beaucoup de concertation dans les prochains jours dans les provinces pour savoir comment réorganiser notre combat. Ce n’est pas fini", dit-il.
La fin du conflit encore loin
Les deux mois de chaos dans les rues de Bangkok ne sont en effet probablement qu'un avant-goût des violences politiques qui pourraient surgir en Thaïlande, les mouvements de manifestation étant devenus particulièrement militants.
Alors que la Thaïlande a vu de nombreux coups d'états et soulèvements populaires dans son histoire turbulente, elle se dirige désormais sur un territoire inexploré, la fracture s'approfondissant entre les élites et les classes pauvres urbaines et rurales, estiment les analystes.
"Il y a eu des rumeurs et des murmures dans le passé mais jamais l’expression d’une colère et d’une fureur de cette ampleur", constate Thitinan Pongsudhirak, politologue à l’université de Chulalongkorn. "L’émotion brute derrière les convictions politiques ont augmenté les enjeux dans la vie politique thaïlandaise. Cela a aussi creusé la polarisation".
Pavin Chachavalpongpun, de l'Institut des études d'Asie du Sud-est à Singapour, explique que les violences deviennent une partie de la culture politique en Thaïlande. "Trente-cinq bâtiments brûlent, pas seulement à Bangkok mais aussi dans d'autres endroits de Thaïlande. Cela signifie la radicalisation de la politique thaïlandaise. Je dirais même que c’est la nouvelle radicalisation de la Thaïlande". "Ce n'est pas la fin du conflit, c'est juste le début d'une autre phase de guerre. Qu'importe la manière dont vous l'appelez : guerre civile, guérilla… C'est ouvert à interprétation".
Toujours est-il que les attaques semblent très ciblées, une grande partie des bâtiments incendiés correspond à la liste dressée par les Chemises rouges des sociétés qui soutiennent le mouvement opposé des Chemises jaunes, telles que la Bangkok Bank, Central, la chaine de télévision Channel 3, ou encore la Kasikorn Bank.
Un mouvement de vrais militants sensibilisés et organisés
Les Rouges se plaignent que les pauvres ont été laissés derrière alors que la classe moyenne de Bangkok peut profiter des fruits de décennies de croissance économique, tandis que les élites tiennent les reines du pouvoir politique et militaire.
Ils sont majoritairement les partisans de l'Ex-premier ministre Thaksin Shinawatra, qui a été expulsé par un coup d'état en 2006. Célébré pour ses politiques populistes qui ont bénéficié aux pauvres, Thaksin a aussi été accusé d'abus flagrant sur les droits de l'homme et de corruption. Malgré les critiques, Thaksin et ses alliés ont gagné toutes les élections depuis cette dernière décennie, et Abhisit Vejjajiva va devoir faire face à une rude bataille lors du prochain vote, prévu désormais à la fin 2011.
L'élite thaïlandaise voit les Chemises rouges principalement comme des soldats payés par l'Ex-premier ministre Thaksin Shinawatra, mais William Case, directeur de City University's Southeast Asia Research Centre à Hong Kong, explique que leur mouvement est devenu de plus en plus sophistiqué. "Ils ont beaucoup plus de savoir-faire organisationnel, sont beaucoup plus sensibilisés et ont plus de capacité d’action qu’auparavant. Ils sont en mesure d’agir sur les ressentiments des classes maintenant", explique-t-il. "Une fois qu'ils ont commencé à s'organiser de cette manière, il devient très difficile de les arrêter".
L'attachement des Chemises rouges aux leaders, Thaksin y compris, s'était peu à peu effrité au fil des jours. Des réunions s'organisaient chaque soir dans certaines communautés pour commenter les discours des leaders, et un sentiment de défiance s'était progressivement installé, selon certains manifestants. "Nous avons le sentiment qu'ils [les leaders] suivent d'autres objectifs que nous", nous avait confié la semaine dernière Mot Dam, une militante engagée dans des réseaux souterrains.
Paul Chambers, spécialiste de la Thaïlande à l'université de Heidelberg, précise que les Rouges se sont "galvanisés en une armée du peuple", mimant les tactiques qu’avaient employé les manifestants Chemises jaunes lorsqu’ils avaient bloqué les aéroports de Bangkok en 2008.
"Si vous continuez à voir l’utilisation des manifestations pour amener le changement d’une manière de plus en plus violente, alors les gens vont s’habituer à ça", explique-t-il.
source http://www.lepetitjournal.com/bangkok/accueil-bangkok/58435-crise-politique-qles-leaders-nous-ont-laisses-tomber-mais-la-lutte-continue-q.html
Au lendemain de l’opération militaire sur le site de manifestation des Chemises rouges qui a mis fin à plus de deux mois de rassemblement dans Bangkok, l’évacuation des manifestants réfugiés dans le temple Pathum Wanaram aura constitué l’un des moments bouleversants, qui s’est ajouté aux images de désolation du quartier tout entier.
Après une nuit que beaucoup ont décrite comme terrifiante, un millier de personnes qui étaient venues se cacher là pensant être en sécurité, sont sorties, vers 8h du matin, en suivant le couloir formé par des policiers menant au quartier général de la police situé juste de l’autre côté de la rue. Pour l’essentiel des femmes et des personnes âgées, ils ont avancé dans un silence funèbre - beaucoup exprimant une grande émotion plaquée sur le visage, certains les larmes aux yeux, d’autres pétrifiés ou sans expression - jusqu’à la cour de rassemblement qui fait face au temple pour aller s’asseoir en groupe après avoir été fouillés par les policiers. Là, ils devaient attendre encore quelques heures que des bus de ville viennent les chercher pour les amener 500 mètres plus loin, près du stade National (Supachalasai), où ils devaient s’enregistrer avant d'embarquer dans d'autres bus pour rentrer chez eux.
Forte tension émotionnelle
Cette émotion était pour beaucoup teintée de terreur, de colère et d’incompréhension.
Tout d'abord la terreur de la nuit passée dans le temple. Une femme d’une cinquantaine d’année raconte que, vers quatre heures du matin, des affrontements violents ont eu lieu autour du temple, et que 6 personnes ont été tuées dans l’enceinte même du lieu de culte, ce que confirmera dans la journée les experts de la police scientifique. "C’était terrifiant, dit-elle, nous avions très peur".
La colère et l’incompréhension viennent manifestement du sentiment que Bangkok les rejette complètement, définitivement. Le Bangkok du gouvernement qu'ils considèrent illégitime pour avoir pris la place de leur élu à la faveur d'un coup d'Etat et de violences perpétrées par leurs opposants restées impunies à ce jour. Le Bangkok de la classe moyenne qui méprise généralement les provinciaux, tout particulièrement les Issanais. Le Bangkok des leaders du mouvement et du parti politique qui les ont abandonnés à leur propre sort après les avoir utilisés. "Ce ne sont pas que des casseurs qui ont brulé les bâtiments, nous avoue Ball, un étudiant de 25 ans qui a passé plusieurs semaines avec le mouvement. Ce sont les gens, de simples fermiers pour certains, car ils sont en colère, ils sont écœurés".
Assises depuis plus de 5 heures dans la cour du quartier général de la police, une femme de soixante-dix ans explose de colère. "Ils sont où ces gens qui nous ont tout promis ! Ils nous ont demandé de venir à Bangkok pour défendre la démocratie et réduire les inégalités et ils abandonnent la lutte au premier danger. Ils nous ont promis qu’ils s’occuperaient de nous, disant que l’on pouvait quitter nos foyers pendant plusieurs jours, qu’ils couvriraient nos dépenses, et ils nous laissent aujourd’hui ici sans rien. Ils nous ont dit que nous pouvions nous réfugier dans le temple, que nous y serions en sécurité, et six de nos amis sont morts devant nous, ajoute la dame, blessée légèrement au ventre par une balle. Qu’ils aillent au diable !"
Pour autant, le combat des Chemises rouges ne semble pas terminé. "Pour l’instant, les gens ont tout laissé là-bas (Ratchaprasong), leur esprit, leurs affaires, leur enthousiasme, etc. Ils n’ont ramené que leur propre corps à la maison, nous dit Ball. Mais il va y avoir beaucoup de concertation dans les prochains jours dans les provinces pour savoir comment réorganiser notre combat. Ce n’est pas fini", dit-il.
La fin du conflit encore loin
Les deux mois de chaos dans les rues de Bangkok ne sont en effet probablement qu'un avant-goût des violences politiques qui pourraient surgir en Thaïlande, les mouvements de manifestation étant devenus particulièrement militants.
Alors que la Thaïlande a vu de nombreux coups d'états et soulèvements populaires dans son histoire turbulente, elle se dirige désormais sur un territoire inexploré, la fracture s'approfondissant entre les élites et les classes pauvres urbaines et rurales, estiment les analystes.
"Il y a eu des rumeurs et des murmures dans le passé mais jamais l’expression d’une colère et d’une fureur de cette ampleur", constate Thitinan Pongsudhirak, politologue à l’université de Chulalongkorn. "L’émotion brute derrière les convictions politiques ont augmenté les enjeux dans la vie politique thaïlandaise. Cela a aussi creusé la polarisation".
Pavin Chachavalpongpun, de l'Institut des études d'Asie du Sud-est à Singapour, explique que les violences deviennent une partie de la culture politique en Thaïlande. "Trente-cinq bâtiments brûlent, pas seulement à Bangkok mais aussi dans d'autres endroits de Thaïlande. Cela signifie la radicalisation de la politique thaïlandaise. Je dirais même que c’est la nouvelle radicalisation de la Thaïlande". "Ce n'est pas la fin du conflit, c'est juste le début d'une autre phase de guerre. Qu'importe la manière dont vous l'appelez : guerre civile, guérilla… C'est ouvert à interprétation".
Toujours est-il que les attaques semblent très ciblées, une grande partie des bâtiments incendiés correspond à la liste dressée par les Chemises rouges des sociétés qui soutiennent le mouvement opposé des Chemises jaunes, telles que la Bangkok Bank, Central, la chaine de télévision Channel 3, ou encore la Kasikorn Bank.
Un mouvement de vrais militants sensibilisés et organisés
Les Rouges se plaignent que les pauvres ont été laissés derrière alors que la classe moyenne de Bangkok peut profiter des fruits de décennies de croissance économique, tandis que les élites tiennent les reines du pouvoir politique et militaire.
Ils sont majoritairement les partisans de l'Ex-premier ministre Thaksin Shinawatra, qui a été expulsé par un coup d'état en 2006. Célébré pour ses politiques populistes qui ont bénéficié aux pauvres, Thaksin a aussi été accusé d'abus flagrant sur les droits de l'homme et de corruption. Malgré les critiques, Thaksin et ses alliés ont gagné toutes les élections depuis cette dernière décennie, et Abhisit Vejjajiva va devoir faire face à une rude bataille lors du prochain vote, prévu désormais à la fin 2011.
L'élite thaïlandaise voit les Chemises rouges principalement comme des soldats payés par l'Ex-premier ministre Thaksin Shinawatra, mais William Case, directeur de City University's Southeast Asia Research Centre à Hong Kong, explique que leur mouvement est devenu de plus en plus sophistiqué. "Ils ont beaucoup plus de savoir-faire organisationnel, sont beaucoup plus sensibilisés et ont plus de capacité d’action qu’auparavant. Ils sont en mesure d’agir sur les ressentiments des classes maintenant", explique-t-il. "Une fois qu'ils ont commencé à s'organiser de cette manière, il devient très difficile de les arrêter".
L'attachement des Chemises rouges aux leaders, Thaksin y compris, s'était peu à peu effrité au fil des jours. Des réunions s'organisaient chaque soir dans certaines communautés pour commenter les discours des leaders, et un sentiment de défiance s'était progressivement installé, selon certains manifestants. "Nous avons le sentiment qu'ils [les leaders] suivent d'autres objectifs que nous", nous avait confié la semaine dernière Mot Dam, une militante engagée dans des réseaux souterrains.
Paul Chambers, spécialiste de la Thaïlande à l'université de Heidelberg, précise que les Rouges se sont "galvanisés en une armée du peuple", mimant les tactiques qu’avaient employé les manifestants Chemises jaunes lorsqu’ils avaient bloqué les aéroports de Bangkok en 2008.
"Si vous continuez à voir l’utilisation des manifestations pour amener le changement d’une manière de plus en plus violente, alors les gens vont s’habituer à ça", explique-t-il.
source http://www.lepetitjournal.com/bangkok/accueil-bangkok/58435-crise-politique-qles-leaders-nous-ont-laisses-tomber-mais-la-lutte-continue-q.html
Admin- Admin
- Messages : 4881
Date d'inscription : 31/05/2009
Re: "Les leaders nous ont laissés tomber, mais la lutte continue !"
pour cet article très interressant
stilia- Localisation : à l'ouest
Messages : 341
Date d'inscription : 02/03/2010
Re: "Les leaders nous ont laissés tomber, mais la lutte continue !"
A voir l'émission "C dans l'air " interessante à regarder (bonne synthèse) ---> http://www.france5.fr/c-dans-l-air/index-fr.php?page=resume&id_rubrique=1444
thanaka- Admin
- Localisation : il existe une application pour ça
Messages : 2606
Date d'inscription : 31/05/2009
Re: "Les leaders nous ont laissés tomber, mais la lutte continue !"
Je viens de regarder une partie de l'émission, je me garde la suite pour plus tard. C'est en effet très intéressant, ça éclaircit pas mal de zone d'ombre en ce qui me concerne.
Merci pour le lien.
Merci pour le lien.
Nelfe- Localisation : BZH
Messages : 612
Date d'inscription : 01/02/2010
Re: "Les leaders nous ont laissés tomber, mais la lutte continue !"
pascal a écrit:A voir l'émission "C dans l'air " interessante à regarder (bonne synthèse) ---> http://www.france5.fr/c-dans-l-air/index-fr.php?page=resume&id_rubrique=1444
Pour une fois que cette émission ne tourne pas à la foire d'empoigne et au brouhaha incompréhensible, merci Pascal pour ce lien
Malgré les efforts répétés et conjoints du journaliste sur-place et de Calvi, les invités ont parlé d'une voix calme et sans créer de polémique, ils ont expliqué parfaitement, à mon avis, ce qu'il se passe, ainsi que l'esprit thaï et, surtout, désamorcé toute tentative "calvienne" pour faire passer son message de peur et de polémique habituel, à son grand dam
Pas sûr que les intervenants soient réinvités, malheureusement.
Mustang- Localisation : Royan (17)
Messages : 328
Date d'inscription : 07/09/2009
Parichart, une Thaïlandaise qui ne décolère pas
Parichart, une Thaïlandaise qui ne décolère pas
Chiang Mai, Thaïlande — Frustrée, déçue et sans domicile, Parichart Chanmanee n'a pas gagné grand chose de ses semaines de manifestations à Bangkok avec les «chemises rouges», mais elle assure qu'elle reviendra bientôt, à leurs côtés, conquérir la démocratie.
Mère de deux enfants, cette femme de 52 ans vit seule à Chiang Mai, la plus grande ville du nord de la Thaïlande, où elle a dû rentrer la semaine dernière après l'assaut des militaires contre le camp retranché des manifestants.
Elle a découvert qu'elle n'avait plus de domicile: les propriétaires l'ont expulsée parce qu'elle n'avait pas payé son loyer.
Mais l'enthousiasme de la militante n'est pas entamé. Son combat pour la démocratie, la justice et une société plus égalitaire est plus important. Comme l'est sa haine des élites de Bangkok et du premier ministre Abhisit Vejjajiva.
«Je suis ravie que Bangkok ait été en flammes», dit-elle en référence aux quelque 35 bâtiments, dont la Bourse, qui ont brûlé mercredi après la dispersion de la manifestation. «Faisons comprendre aux riches ce que souffrir veut dire. Abhisit doit chuter».
La société thaïlandaise, profondément divisée, a encore fait un pas en arrière au terme de cette crise violente.
Les «rouges», pour beaucoup venus des régions rurales du nord et du nord-est, se jugent méprisés et privés des fruits du développement économique par les élites de la capitale autour du palais royal — militaires, magistrats, hauts-fonctionnaires, hommes d'affaires.
Certains d'entre eux se réclament aussi de Thaksin Shinawatra, ex-premier ministre en exil. Renversé en 2006 par un coup d'État militaire après cinq ans de gestion populiste, le magnat des télécommunications est, pour ses partisans, le seul homme politique à s'être jamais préoccupé du sort des défavorisés.
Né à Chiang Mai, il y jouit toujours d'une solide popularité. Mais à entendre certains militants, le combat des «rouges» n'était pas pour lui.
«Nous sommes allés dans la rue pour manifester notre frustration sur la hausse des prix du riz, de l'huile et des frais médicaux», explique Saisunee Assawasunthornkul, 48 ans. «Les élites se font plaisir pendant que les pauvres souffrent».
À Bangkok, elle préparait à manger pour les manifestants. Elle affirme avoir vendu sa moto, sa télévision et sa machine à coudre pour se payer le billet pour la capitale.
«Les amis avec qui je dormais dans la rue me manquent. C'était dur, il faisait chaud. Mais nous étions égaux. Nous avons mangé la même nourriture, ri ensemble, échangé nos opinions politiques», explique cette vendeuse de fruits.
Elle explique aussi avoir vu un manifestant mercredi se faire tuer par un tireur embusqué et s'être réfugiée dans l'hôpital de la police lorsqu'elle a entendu parler de l'assaut imminent des forces de l'ordre. «Je ne voulais pas mourir», dit-elle.
Son amie Parichart était pour sa part en charge de la sécurité dans le camp retranché. «Ma mission était de m'assurer qu'aucune arme ne rentrait dans le camp. Il y avait une vraie solidarité entre nous. Nous étions unis».
Passion forte
Depuis jeudi, le Premier ministre Abhisit multiplie les appels à la réconciliation. Mais la passion des deux militantes s'accommode mal avec l'idée d'un dialogue.
Parichart se dit prête à mourir pour faire chuter le pouvoir en place et répète n'avoir «pas peur des armes».
«Nous sommes impatientes de retourner dans les rues de Bangkok bientôt», confirme son amie Saisunee. «Nous savons que notre lutte sera longue. Nous voulons un gouvernement propre maintenant, du riz bon marché, la justice pour tous. Il y aura de nouvelles manifestations».
source http://www.ledevoir.com
Chiang Mai, Thaïlande — Frustrée, déçue et sans domicile, Parichart Chanmanee n'a pas gagné grand chose de ses semaines de manifestations à Bangkok avec les «chemises rouges», mais elle assure qu'elle reviendra bientôt, à leurs côtés, conquérir la démocratie.
Mère de deux enfants, cette femme de 52 ans vit seule à Chiang Mai, la plus grande ville du nord de la Thaïlande, où elle a dû rentrer la semaine dernière après l'assaut des militaires contre le camp retranché des manifestants.
Elle a découvert qu'elle n'avait plus de domicile: les propriétaires l'ont expulsée parce qu'elle n'avait pas payé son loyer.
Mais l'enthousiasme de la militante n'est pas entamé. Son combat pour la démocratie, la justice et une société plus égalitaire est plus important. Comme l'est sa haine des élites de Bangkok et du premier ministre Abhisit Vejjajiva.
«Je suis ravie que Bangkok ait été en flammes», dit-elle en référence aux quelque 35 bâtiments, dont la Bourse, qui ont brûlé mercredi après la dispersion de la manifestation. «Faisons comprendre aux riches ce que souffrir veut dire. Abhisit doit chuter».
La société thaïlandaise, profondément divisée, a encore fait un pas en arrière au terme de cette crise violente.
Les «rouges», pour beaucoup venus des régions rurales du nord et du nord-est, se jugent méprisés et privés des fruits du développement économique par les élites de la capitale autour du palais royal — militaires, magistrats, hauts-fonctionnaires, hommes d'affaires.
Certains d'entre eux se réclament aussi de Thaksin Shinawatra, ex-premier ministre en exil. Renversé en 2006 par un coup d'État militaire après cinq ans de gestion populiste, le magnat des télécommunications est, pour ses partisans, le seul homme politique à s'être jamais préoccupé du sort des défavorisés.
Né à Chiang Mai, il y jouit toujours d'une solide popularité. Mais à entendre certains militants, le combat des «rouges» n'était pas pour lui.
«Nous sommes allés dans la rue pour manifester notre frustration sur la hausse des prix du riz, de l'huile et des frais médicaux», explique Saisunee Assawasunthornkul, 48 ans. «Les élites se font plaisir pendant que les pauvres souffrent».
À Bangkok, elle préparait à manger pour les manifestants. Elle affirme avoir vendu sa moto, sa télévision et sa machine à coudre pour se payer le billet pour la capitale.
«Les amis avec qui je dormais dans la rue me manquent. C'était dur, il faisait chaud. Mais nous étions égaux. Nous avons mangé la même nourriture, ri ensemble, échangé nos opinions politiques», explique cette vendeuse de fruits.
Elle explique aussi avoir vu un manifestant mercredi se faire tuer par un tireur embusqué et s'être réfugiée dans l'hôpital de la police lorsqu'elle a entendu parler de l'assaut imminent des forces de l'ordre. «Je ne voulais pas mourir», dit-elle.
Son amie Parichart était pour sa part en charge de la sécurité dans le camp retranché. «Ma mission était de m'assurer qu'aucune arme ne rentrait dans le camp. Il y avait une vraie solidarité entre nous. Nous étions unis».
Passion forte
Depuis jeudi, le Premier ministre Abhisit multiplie les appels à la réconciliation. Mais la passion des deux militantes s'accommode mal avec l'idée d'un dialogue.
Parichart se dit prête à mourir pour faire chuter le pouvoir en place et répète n'avoir «pas peur des armes».
«Nous sommes impatientes de retourner dans les rues de Bangkok bientôt», confirme son amie Saisunee. «Nous savons que notre lutte sera longue. Nous voulons un gouvernement propre maintenant, du riz bon marché, la justice pour tous. Il y aura de nouvelles manifestations».
source http://www.ledevoir.com
thanaka- Admin
- Localisation : il existe une application pour ça
Messages : 2606
Date d'inscription : 31/05/2009
Sujets similaires
» A Rangoon, même la gastronomie surfe sur l'ouverture
» Birmanie - un zest d'ouverture de facade
» Singapour - Appel à tomber amoureux
» Asie : Perspectives
» Vietnam - Déterminée à poursuivre sa lutte pour la démocratie
» Birmanie - un zest d'ouverture de facade
» Singapour - Appel à tomber amoureux
» Asie : Perspectives
» Vietnam - Déterminée à poursuivre sa lutte pour la démocratie
Page 1 sur 1
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum