Extorsion et confusion entachent la répression sur les immigrés
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Extorsion et confusion entachent la répression sur les immigrés
La Thaïlande a lancé depuis février dernier une campagne de répression nationale afin d'identifier et d'arrêter les immigrés illégaux. Dans certains endroits, le nombre de contrôles a été multiplié par cinq, mais les associations de défense des droits de l'homme dénoncent des extorsions de la part de la police, qui demande parfois des pots-de-vin en échange de la libération d'un immigré. De plus, le mécontentement monte chez certains directeurs d'entreprise, qui voient leur activité totalement paralysée lorsque les autorités décident de faire de nouvelles rafles
Les problèmes de Oo avec la police locale thaïlandaise ont démarré après avoir fait une demande relativement commune en Asie : que les officiers enlèvent leurs chaussures avant d'entrer dans son logement. Cela lui a coûté un mois de salaire.
Cet immigré de 26 ans, qui vient de Birmanie, raconte que des agents de police de Mahachai, une zone industrielle près de Bangkok, lui ont alors demandé s'il voulait causer des problèmes. Oo prétend qu’il a été faussement accusé de prêts illégaux et menacé d’expulsion – en dépit d’avoir des documents prouvant son statut juridique – jusqu’à ce qu’il remette plus de 4.000 bahts, un montant équivalant à sa rémunération pour environ 20 jours de travail.
La répression s’intensifie et le gouvernement admet des abus
La Thaïlande a récemment intensifié ses opérations contre les immigrés non-enregistrés dans le cadre des tentatives visant à légaliser son énorme population de travailleurs étrangers. Mais les groupes de défense des droits de l'homme expliquent que beaucoup de personnes sont entrainées dans ce processus même si elles possèdent des documents officiels, tandis que d’autres craignent que la police utilise ce genre d’opération pour intensifier les extorsions de fonds. Andy Hall, consultant à la Fondation pour le développement et les droits de l'homme, explique que la police extorque de l'argent aux immigrés vulnérables avec "une totale impunité". "Je pense que le fait d’extorquer presque systématiquement dans toute la Thaïlande montre à quel point une culture considérant les immigrés comme une seconde classe, et même presque comme des sous-humains, est désormais ancrée", déplore-t-il.
Le gouvernement a récemment demandé aux autorités de redoubler d’efforts pour identifier les immigrés illégaux, après que la date limite fixée à février dernier pour s’enregistrer au Régime national de vérification – qui vise à normaliser le statut des travailleurs étrangers - a été dépassée. Le porte-parole du gouvernement, Panitan Wattanayagorn, a expliqué que les autorités avaient été soucieuses de convaincre les immigrés à rejoindre le système "afin qu'ils puissent être protégés", mais a ajouté que le gouvernement était au courant de cas d'extorsion par la police. "Si les officiers qui commettent des fraudes sont signalés nous les poursuivront... Mais le problème est que beaucoup d'immigrés ne viennent pas porter plainte". Les chiffres de la police de Mahachai montrent une multiplication des arrestations à plus de 400 individus en août, comparé à 80 en mars. Mais Hall explique que le chiffre réel doit probablement se situer à plusieurs milliers d'immigrés qui payent ensuite pour être relâchés.
Des rafles qui paralysent des entreprises entières
Le nombre total d'immigrés provenant de Birmanie, du Laos et du Cambodge pourrait excéder deux millions en Thaïlande, quand seul un million de travailleurs non-enregistrés est pris en compte. Hall souligne que ceux qui viennent de Birmanie ne fuient pas les conflits, mais laissent derrière eux une "économie en ruine" et peuvent ensuite envoyer de l’argent à leur famille. "Peut-être que les conditions sont meilleures qu'en Birmanie, mais ils sont pris entre deux enfers". Une directrice-générale d’une entreprise à Samut Sakhon, qui a refusé d'être nommée, explique que les autorités ont arrêté plus de 200 personnes en l'espace d'une journée sans vérifier leurs papiers. Les ouvriers ont ensuite été amenés à Bangkok, forçant les employeurs à envoyer les documents à la capitale afin d’obtenir leur libération. "Dans certaines usines 30 à 40 ouvriers ont été arrêtés, ainsi il est impossible de faire fonctionner l’entreprise. Pouvez-vous imaginer combien nous perdons en arrêtant de travailler durant quelques jours ? La police ne semble pas s'en préoccuper", explique-t-elle.
Phyu Pwint Oo, une birmane timide de 19 ans, raconte justement avoir été prise dans une rafle alors qu’elle retournait chez elle, à la fin de sa journée de travail dans une usine de fruits de mer à Mahachai. Elle explique que ce n'est que lorsqu'elle s'est retrouvée dans une cellule à Bangkok avec 50 autres femmes qu'elle a réalisé avoir été arrêtée par la police de l'immigration. "Ils m'ont donné trois repas par jour, mais je n'ai pas eu la possibilité de prendre une douche ou de changer mes vêtements durant six jours", a-t-elle raconté à l'AFP, un jour après que son employeur a assuré sa libération. Phil Robertson, Directeur-adjoint de Human Rights Watch en Asie, déclare que l'arrivée des forces de l'immigration centrale dans une zone signifie que "tous les paris sont fermés", avec l'annulation des arrangements effectués entre la police locale, les employeurs et les ouvriers. Selon lui, les immigrés sont habituellement une "cible facile" pour la police locale, qui arrête plus de personnes afin de dépasser ses quotas, avant d’en relâcher certains en échange de pots-de-vin. Le Commandant de la police de Mahachai, Colonel Pongsak Chunak, a quant à lui rejeté tout fait de corruption dans son unité. "Il n'y a pas eu de plaintes d'extorsion dans le secteur sous mon commandement", a-t-il assuré. Le sujet reste tabou dans un pays où même les entreprises craignent la police. "La vérité est là mais je ne peux rien dire. Cela pourrait être dangereux pour ma vie", a réagi la directrice-générale de Samut Sakhon après avoir été interrogée sur les questions de corruption.
source http://www.lepetitjournal.com/bangkok/accueil-bangkok/63760-immigration-extorsion-et-confusion-entachent-la-repression-sur-les-immigres-.html
Les problèmes de Oo avec la police locale thaïlandaise ont démarré après avoir fait une demande relativement commune en Asie : que les officiers enlèvent leurs chaussures avant d'entrer dans son logement. Cela lui a coûté un mois de salaire.
Cet immigré de 26 ans, qui vient de Birmanie, raconte que des agents de police de Mahachai, une zone industrielle près de Bangkok, lui ont alors demandé s'il voulait causer des problèmes. Oo prétend qu’il a été faussement accusé de prêts illégaux et menacé d’expulsion – en dépit d’avoir des documents prouvant son statut juridique – jusqu’à ce qu’il remette plus de 4.000 bahts, un montant équivalant à sa rémunération pour environ 20 jours de travail.
La répression s’intensifie et le gouvernement admet des abus
La Thaïlande a récemment intensifié ses opérations contre les immigrés non-enregistrés dans le cadre des tentatives visant à légaliser son énorme population de travailleurs étrangers. Mais les groupes de défense des droits de l'homme expliquent que beaucoup de personnes sont entrainées dans ce processus même si elles possèdent des documents officiels, tandis que d’autres craignent que la police utilise ce genre d’opération pour intensifier les extorsions de fonds. Andy Hall, consultant à la Fondation pour le développement et les droits de l'homme, explique que la police extorque de l'argent aux immigrés vulnérables avec "une totale impunité". "Je pense que le fait d’extorquer presque systématiquement dans toute la Thaïlande montre à quel point une culture considérant les immigrés comme une seconde classe, et même presque comme des sous-humains, est désormais ancrée", déplore-t-il.
Le gouvernement a récemment demandé aux autorités de redoubler d’efforts pour identifier les immigrés illégaux, après que la date limite fixée à février dernier pour s’enregistrer au Régime national de vérification – qui vise à normaliser le statut des travailleurs étrangers - a été dépassée. Le porte-parole du gouvernement, Panitan Wattanayagorn, a expliqué que les autorités avaient été soucieuses de convaincre les immigrés à rejoindre le système "afin qu'ils puissent être protégés", mais a ajouté que le gouvernement était au courant de cas d'extorsion par la police. "Si les officiers qui commettent des fraudes sont signalés nous les poursuivront... Mais le problème est que beaucoup d'immigrés ne viennent pas porter plainte". Les chiffres de la police de Mahachai montrent une multiplication des arrestations à plus de 400 individus en août, comparé à 80 en mars. Mais Hall explique que le chiffre réel doit probablement se situer à plusieurs milliers d'immigrés qui payent ensuite pour être relâchés.
Des rafles qui paralysent des entreprises entières
Le nombre total d'immigrés provenant de Birmanie, du Laos et du Cambodge pourrait excéder deux millions en Thaïlande, quand seul un million de travailleurs non-enregistrés est pris en compte. Hall souligne que ceux qui viennent de Birmanie ne fuient pas les conflits, mais laissent derrière eux une "économie en ruine" et peuvent ensuite envoyer de l’argent à leur famille. "Peut-être que les conditions sont meilleures qu'en Birmanie, mais ils sont pris entre deux enfers". Une directrice-générale d’une entreprise à Samut Sakhon, qui a refusé d'être nommée, explique que les autorités ont arrêté plus de 200 personnes en l'espace d'une journée sans vérifier leurs papiers. Les ouvriers ont ensuite été amenés à Bangkok, forçant les employeurs à envoyer les documents à la capitale afin d’obtenir leur libération. "Dans certaines usines 30 à 40 ouvriers ont été arrêtés, ainsi il est impossible de faire fonctionner l’entreprise. Pouvez-vous imaginer combien nous perdons en arrêtant de travailler durant quelques jours ? La police ne semble pas s'en préoccuper", explique-t-elle.
Phyu Pwint Oo, une birmane timide de 19 ans, raconte justement avoir été prise dans une rafle alors qu’elle retournait chez elle, à la fin de sa journée de travail dans une usine de fruits de mer à Mahachai. Elle explique que ce n'est que lorsqu'elle s'est retrouvée dans une cellule à Bangkok avec 50 autres femmes qu'elle a réalisé avoir été arrêtée par la police de l'immigration. "Ils m'ont donné trois repas par jour, mais je n'ai pas eu la possibilité de prendre une douche ou de changer mes vêtements durant six jours", a-t-elle raconté à l'AFP, un jour après que son employeur a assuré sa libération. Phil Robertson, Directeur-adjoint de Human Rights Watch en Asie, déclare que l'arrivée des forces de l'immigration centrale dans une zone signifie que "tous les paris sont fermés", avec l'annulation des arrangements effectués entre la police locale, les employeurs et les ouvriers. Selon lui, les immigrés sont habituellement une "cible facile" pour la police locale, qui arrête plus de personnes afin de dépasser ses quotas, avant d’en relâcher certains en échange de pots-de-vin. Le Commandant de la police de Mahachai, Colonel Pongsak Chunak, a quant à lui rejeté tout fait de corruption dans son unité. "Il n'y a pas eu de plaintes d'extorsion dans le secteur sous mon commandement", a-t-il assuré. Le sujet reste tabou dans un pays où même les entreprises craignent la police. "La vérité est là mais je ne peux rien dire. Cela pourrait être dangereux pour ma vie", a réagi la directrice-générale de Samut Sakhon après avoir été interrogée sur les questions de corruption.
source http://www.lepetitjournal.com/bangkok/accueil-bangkok/63760-immigration-extorsion-et-confusion-entachent-la-repression-sur-les-immigres-.html
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