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Comme un air de printemps birman

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Comme un air de printemps birman Empty Comme un air de printemps birman

Message  Admin Lun 16 Jan 2012 - 11:13

"La première image que je garde de mon arrivée en Birmanie est sans doute symbolique de la période de transition que semble vivre le pays.

C'est celle du visage de l'officier de l'immigration à mon arrivée à l'aéroport de Rangoun. Interloquée, cette dame d'une quarantaine d'année qui a vu entrer des milliers de personnes sur le territoire birman était littéralement sidérée à la vue de la mention sur mon visa. "Are you a journalist ? An occidental journalist entering in Birma?" me demande-t-elle interloquée. Dans la foulée, elle appelle ses supérieurs. Une douzaine de personnes m'encercle... Certains prennent des photos. Pour les garder comme un trophée ou pour me ficher, je ne saurai jamais, toujours est-il que tout étant en règle, je sortais de la zone internationale un coup de tampon plus tard.

Le Myanmar, nom officiel de la Birmanie hérité de la junte militaire s'ouvre.

C'est indéniable. Dans les rues et sur les lieux des différents reportages, j'ai été étonné de la facilité avec laquelle les gens se livrent. Certains demandent même à témoigner, ils ne veulent plus se taire et surtout, ils pressentent que ce qui était impossible et impensable il y a encore quelques mois devient une réalité. Voilà qui me rappelle étrangement les récits de mes collègues partis couvrir la Révolution de Jasmin en Tunisie. Dans le hall de mon hôtel, j'ai aussi rencontré un journaliste américain qui vient ici fréquemment mais travaille en toute illégalité, avec un visa de tourisme. Son dernier passage, c'était il y a six mois. Il m'a confié sentir très fort l'évolution provoquée par ce vent de liberté auprès des birmans.

La confirmation m'a été donnée en me rendant à la rédaction du magazine "Voice" par exemple. On assiste d'abord à un élan de vocations pour le métier de journaliste, considéré il n'y a pas si longtemps encore comme extrêmement risqué. La censure, si elle persiste encore, a nettement relâché son étreinte et il n'est désormais plus tabou de relayer des informations sur la LND, le parti de la "Dame de Rangoun". Le pays est au milieu du gué, en plein coeur d'un processus de transition dont tous les journalistes espèrent qu'il ira à son terme avec pour eux l'espoir, comme l'a récemment souhaité publiquement le Ministre de l'Information et de la censure, d'une liberté totale de la presse. Son accès est aussi facilité. D'habitude hermétique à presque toute information venue de l'Occident, dans ce domaine aussi, les choses ont changé. J'ai pu constater par exemple que les sites d'information, y compris américains ou les réseaux sociaux comme Facebook (pourtant interdit en Chine) sont ici consultables.

Une ouverture rendue possible grâce à l'initiative du nouveau gouvernement civil et de son président Thein Sein.

Mais ici l'icône reste Aung San Suu Kyi dont la libération a marqué le début de ce printemps birman. Lors d'un point presse réservé aux médias français dans le cadre de la visite officielle du ministre des Affaires étrangères Alain Juppé, elle nous a confié son ambition politique et sa volonté de travailler avec le pouvoir actuel issu de la dissolution de la junte. On trouve désormais des photos de son père, un héros de l'Indépendance et d'elle-même dans les taxis ou certains commerces alors que le simple fait d'évoquer son nom pouvait encore il y a moins d'un an vous conduire en salle d'interrogatoire.

Malheureusement et c'est encore très visible, le pays est économiquement ruiné par des années de sanctions et de gestion complètement insensée. A Rangoun, une grande partie des habitants vivent de petits commerces, la plupart situés à même le trottoir. Les bâtiments défraîchis, parfois abandonnés faute de pouvoir les entretenir, renforcent la sensation de pauvreté extrême. Les infrastructures sont sommaires, le réseau électrique instable et l'internet en est à ses débuts. Beaucoup reste encore à faire et le développement futur de la nation birmane passera obligatoirement par une stabilisation politique, une levée des sanctions et une arrivée massive d'investissements.

Tout le monde se souvient aussi du climat de confiance et d'ouverture instauré avant les dernières élections libres du pays en 1990. On connait la suite : la LND a remporté les élections mais n'a jamais été autorisée à exercer le pouvoir et la junte a lancé un durcissement sans précédent du régime. Que les choses se passent différemment, que la communauté internationale continue de veiller et que la nation vive enfin apaisée, c'est tout l'espoir placé aujourd'hui dans les futures élections par les birmans et leur sourire inamovible".

http://www.arte.tv/fr/Carnet-du-Myanmar/6335718.html
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Message  Admin Mer 25 Jan 2012 - 16:39

La seconde partie de notre série de reportages en Birmanie confirme ce que j'avais entrevu dès mon arrivée : la Birmanie n'a vraisemblablement plus grand chose à voir avec ce pays au régime autoritaire et liberticide qui foulait les Droits de l'Homme à grand coup de bottes. Même si on est encore loin d'une réelle démocratie, même si la peur d'un retour en arrière reste dans tous les esprits, les conditions dans lesquelles j'ai pu travailler, avec l'aide de Soe mon traducteur, sont la preuve que l'ouverture n'est pas qu'une image fantasmée ou falsifiée, vendue à la communauté internationale par les anciens tenants de la junte.

Pas plus surveillés qu'ailleurs
Pas une fois en une semaine de tournage je n'ai eu à justifier ce que je faisais en pleine rue, ma camera pourtant très peu discrète à l'épaule. Pas une fois on ne nous a demandé de cesser de tourner. Pas une fois je n'ai eu à soumettre mes images à la censure. Jamais je n'ai été invité à montrer mon visa de journaliste ni même à décliner tout simplement mon identité. On ne m'a pas imposé non plus d'être suivi par un fonctionnaire censé nous chaperonner. Pour être tout à fait honnête, il m'est arrivé de rencontrer des conditions plus compliquées à gérer beaucoup plus proche de chez nous, en Europe. De l'avis de certains de mes confrères habitués par le passé à travailler clandestinement pour éviter justement ce genre de désagréments, c'est un phénomène très récent. Les seules questions auxquelles nous avons eu à répondre étaient celles de la population, forcément curieuse, et de quelques journalistes locaux. Eux aussi se sentent donc désormais assez libres pour interviewer des occidentaux, c'est à noter.

Confiance dans la volonté de changement
L'ouverture se sent. Elle se voit. Elle se vit. De nombreux dissidents exilés par crainte pour leur sécurité et celle de leur famille rentrent par exemple au pays, persuadé qu'il est désormais possible de mener le combat politique vers la démocratie de l'intérieur, ouvertement. La plupart ont pourtant fait plusieurs séjours en prison : ils savent très bien ce qui leur en couterait s'ils péchaient par excès de naïveté. Il en va de même pour les prisonniers politiques récemment relâchés. Nous en avons rencontré plusieurs. Tous nous disent vouloir continuer leur vie de militant. Nombre d'entre eux se disent même confiants par rapport à la volonté de changement affichée par le gouvernement civil.

Encore des tabous à lever
Quelques bastions restent cependant encore à prendre. En tant représentant d'un média libre, indépendant et surtout non partisan, j'aurais beaucoup aimé rencontrer certains officiels, à l'origine justement de ces changements. Leur point de vue me parait non seulement intéressant mais surtout indispensable. Hélas ! Les nouveaux maîtres de la Birmanie ne sont pas encore très ouverts aux cameras étrangères et le système hiérarchique hérité de la dictature militaire fait qu'ils sont très peu à avoir le droit de s'exprimer en public. Certains sujets restent aujourd'hui encore tabous comme la lutte menée par l'armée régulière contre les guérillas des différentes minorités ethniques autonomistes (Kachins et Karens principalement). Impossible d'obtenir une autorisation pour tourner dans ces endroits. À en croire les cadres politiques de l'opposition que nous avons rencontrés c'est d'ailleurs dans la gestion de ce problème vieux de plus de 60 ans que réside la principale menace qui plane sur l'élan démocratique et l'unité nationale en passe d'être retrouvée. Selon eux, certains généraux sur le terrain refuseraient d'ailleurs l'ordre de cessez-le-feu donné par le gouvernement civil le 17 janvier dernier et qui constitue un geste d'ouverture supplémentaire). Le risque d'une sécession de l'armée et du pouvoir central n'est donc pas à prendre à la légère.

Damien Wanner pour ARTE Journal

http://www.arte.tv/fr/Carnet-de-route-en-Birmanie---retour-d-un-pays-en-pleine-mutation/6355840.html
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